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d'une démo (I - Opus), Andecavis Tenebrae incarne les premiers pas
discographiques de Selvsmord, horde noire enfantée sur les terres angevines en
2009. Habillée d'un simple mais noble digipack, qu'édite le label Exu Rei
Records (Aryos, In Mortis Veritas...), l'offrande impressionne tout du long par
ses ambiances malsaines et mélodiques qu'une accroche féroce rend plus intenses
encore. Un rapide coup d'oeil sur le pedigree de ses géniteurs, tous issus, ou
presque de l'éphémère Odium Diabolicum des cendres desquelles le groupe est né,
suffit déjà à expliquer cette maîtrise (sombrement) éclairée d'un metal noir
dont la froideur des teintes se conjugue à la puissance infernale d'une trame
aussi tortueuse que vicieuse. Orthodoxe sans être primitif, crépusculaire sans
être mortifère, écrit à l'encre noir du désespoir sans être dépressif, encore
qu'une plainte telle que Carved By Sins évoque le meilleur du Shining originel,
l'art noir forgé par Selvsmord n'innove sans doute en rien, ce qui de toute
façon, n'est pas son propos, mais n'en démontre pas moins avec fierté son
allégeance à une forme d'expression impie d'une grande pureté. Oscillant entre
trois et six minutes au jus, chaque saillie crépite d'une haine dont le vecteur
est autant le chant écorché de Zörh-Hïno que ces guitares abrasives et affutées
creusant dans le sol d'obscures
crevasses, à l'image de Ce qu'il restera de moi..., certainement un des
meilleurs titres du lot, dont les morsures grésillantes répandent un suint
sinistre. Des images de ruines, d'un monde en décrépitude, se dressent lors
d'une écoute tendue comme une verge triomphante. Émaillé de courtes pistes
instrumentales qui participent de cette humanité en perdition (Insomnia),
Andecavis Tenebrae suit les méandres sinueux d'une âme tourmentée à travers une
reptation tour à tour agressive (Ad Sacrificium) ou plus lancinante (Statue
d'escarres), laissant éclater un fiel bouillonnant. Grâce à une écriture
dynamique de laquelle ne sont jamais absentent de sourdes mélodies, Selvsmord
distille son venin, empoisonnant tout l'espace à des kilomètres à la ronde. Publié
en 2014, il n'est pas trop tard pour déflorer cet opus implacable, héritier
d'une longue tradition nationale qu'il honore avec sévérité et un sens des
atmosphères glaciales et funèbres aussi grave qu'admirable. Souhaitons que le
groupe n'en reste pas là et ne rejoigne pas cette (trop) longue litanie de
projets prometteurs trop vite avalés par les ténèbres. Fort d'un potentiel
qu'on devine encore à peine dépucelé, il serait dommage que Selvsmord ne
poursuive pas son œuvre, ce à qu'il vient juste pourtant de renoncer à faire,
ayant pris la décision de se saborder avec panache. 3/5 (2016)
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