Temple
Of Baal a bien changé depuis ses débuts, il y a dix-sept ans déjà, sous l'égide
d'un art noir malfaisant. C'était l'époque d'Oaken Shield et la démo
"Black Unholy Presence" et sa délicieuse pochette. Peu à peu, le
groupe a évolué pour finalement braconner sur les terres d'un black death plus
insidieux. Est-ce à dire pourtant qu'il a mis du sirop dans son vin de messe ?
Pas vraiment, comme ses concerts d'une violence déchaînée le prouvent encore.
Il n'en demeure pas moins que "Verses Of Fire", par ses modelés plus
tortueux et sa durée étonnamment longue (plus d'une heure), a marqué un
tournant dans la carrière des Parisiens. Que ces derniers remettent déjà le
couvert, deux ans après, nous laisse penser que "Mysterium" devrait
être fait du même bois malsain et complexe que son devancier. Ce qui se vérifie
et ce, dès le puissant 'Lord Of Knowledge And Death' qui, du haut de ses neuf
minutes au compteur, a des allures de portes monumentales ouvrant sur un
labyrinthe plongé dans une charbonneuse obscurité que peuplent des créatures
monstrueuses. Longs et cendreux préliminaires, guitares gonflées d'une semence
vicieuse qui creusent de profondes tranchées et ossature que déchirent de
multiples breaks, définissent une saillie qui d'emblée annonce la couleur.
Noire forcément, mais à laquelle viennent se mélanger des teintes
ensanglantées. Cette torrentielle entrée en matière suffit à démontrer que
Temple Of Baal dresse toujours bien haut une inspiration plus vigoureuse que
jamais. Elle témoigne aussi d'une brutalité intacte quoique plus sournoise,
moins frontale peut-être, encore que des titres comme 'Divine Scythe' ou
'Hosanna' ne soient pas avares en furieuses agressions, mais non moins
intenses. Bref, le groupe serre le frein à main et s'abîme au fond d'un
charnier d'atmosphères aussi viciées que mortifères, pataugeant dans les
miasmes fétides d'un death metal sinistre ('Holy Art Thou'). Franchissant
toutes la barre des six minutes, ces hosties macèrent dans un jus reptilien où
infuse une violente négativité. Tentaculaires, elles répandent leur poison avec
une force à la fois viscérale et souterraine. Plus on le pénètre et plus
"Mysterium" se dévoile, bouillonnant d'une haine curieusement pleine
de finesse. A son écoute, aussi explosive que rampante, on mesure à quel degré
de maîtrise mêlée de perversité Temple Of Baal est finalement parvenu. Alors
qu'on croyait qu'il ne pourrait pas faire mieux que "Verses Of Fire",
il enfante au contraire son méfait le plus abouti à ce jour, ni plus ni moins,
coulant sa bestialité dans le creuset obscur d'ambiances vertigineuses. Les
vétérans ont la peau dure... (2015)
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