21 janvier 2013

Chronique : AmenRa - Mass V (2012)





Vagin noir et béant, on ne saurait trouver meilleur porte d'entrée à l'univers de AmenRa que ce bunker grisâtre ornant le visuel de Mass V. Massif et austère, organique et solitaire. Promotion attendue et méritée, le fait que les Flamands aient signé chez Neurot Recordings ne signifie pas que ceux-ci aient décidé de baillonner ni leur déchirante négativité ni une identité dans les veines de laquelle coule certes toujours l'influence tutélaire neurosienne, dont la présence d'une de ses têtes pensantes, Scott Kelly pour ne pas le nommer, sur le dernier titre n'étonnera donc personne, d'autant plus que l'homme n'a jamais été avare de ce genre d'invitation. Quatre ans après un Mass IIII qui a pu en décevoir certain, AmenRa accouche donc de l'opus idéal dont la courte durée loin de le fragiliser lui confère au contraire une sourde intensité.  Le groupe dresse quatre blockhaus où la noirceur la plus granitique et tellurique se conjugue à la beauté la plus triste et désespérée. L'oeuvre démarre d'une manière relativement classique avec "Deadborn And Buried" dont l'entame squelettique précède un déchaînement épidermique emporté par les vocalises hurlées de Colin van Eeckhout, titre aux teintes ferrugineuse souvent au bord de la rupture, gravitant le long d'un gouffre sans fond. Puis progressivement, Mass V empreinte un autre chemin, d'un abord plus posé mais en réalité plus sombre et définitif encore. Long de plus de 13 minutes, "A mon âme" en forme l'épicentre, le point névralgique, douloureuse montée en puissance qui explose lors d'une seconde partie minée par un désespoir absolu, ressac charbonneux qui vient se fracasser contre une falaise de frissons et puis repart. Souligné par des guitares et une rythmique déjà prisonnières des limbes, le chant dégueule comme si demain ne devait plus jamais exister. Mass V ne comporterait que cette plainte qu'il serait quand même indispensable. Ce serait toutefois occulter la violence émotionnelle qui couve sous la roche du terminal "Nowena", conclusion mortfière qui achève l'auditeur par son sentiment d'inexorabilité poisseuse. AmenRa vient d'enfanter sinon son meilleur disque au moins son effort le plus maîtrisé à ce jour, dont la qualité méritait bien quatre ans d'attente...  (Alternative)




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