Il serait commode de présenter Arche comme le nouveau projet de Eppe Kuismin, l'ancien guitariste de Profetus avec lequel il a gravé les excellents Coronation Of The Black Sun (2009) puis ... To Open The Passages In Dusk (2012) mais en vérité ce groupe n'a rien de neuf puisqu'il a été fondé il y a neuf ans déjà. Le fait est cependant qu'il n'avait jusqu'à présent émis qu'un seul signal de vie, Undercurrents (2015), simple EP qui plus est, bien que sa durée voisinant avec la demi heure, le rapprochait d'un album à part entière. Nous en étions donc restés là avec Arche dont le silence semblait vouloir le condamner aux limbes sinon à l'oubli. Nombreux sont ainsi ceux qui le découvriront avec ce Transitions que nous n'attentions plus. Reste que parler de groupe à son sujet est maladroit car il est avant tout le terrain du (quasi) seul Eppe Kuismin, lequel assure tous les instruments (chant compris), à l'exception de la batterie qu'il confie à Ville Raittila qu'il a côtoyé au sein de Worthless. Le genre chevillé au corps, la présence du guitariste inscrit inévitablement Arche dans la grande tradition du doom finlandais. Véritable AOC, celui-ci se décline sous plusieurs formes : true à la Reverend Bizarre, blafard comme Shape Of Despair ou abyssal et suffocant à la manière d'un Tyranny.
Ce premier véritable opus n'est pourtant rien de tout cela même s'il s'enfonce incontestablement dans les pales arcanes d'un caveau funéraire. Mais Transitions répand sa douleur pétrifiée avec plus de tristesse que de dépression. Son expression du genre n'est pas suicidaire bien que toute trace de vie et d'espoir en soit absente. Du funeral doom, le duo développe une approche plus organique, moins éthérée mais pas moins belle comme l'illustre 'Transition', épicentre (presque) instrumentale toute en arpèges osseux. Différent de Profetus dont il n'épouse pas la mélancolie cireuse, Arche n'en respecte pas moins le credo doloriste. Voix d'outre-tombe, guitares engourdies et percussions qui résonnent comme d'ultimes battements de cœur irriguent une procession fantomatique engluée dans une lenteur funèbre. Mais ce goût pour les notes acoustiques et cette dureté de traits couplés à des lignes de guitares d'une bouleversante force émotionnelle ('Reverential Silence') nourrissent l'identité des deux Finlandais. Il en découle un menu robuste en cela qu'il s'articule auteur de deux pavés longs d'une quinzaine de minutes chacun, assommés par une tristesse contrite et séparés par une fragile respiration. Le résultat est magnifique de pureté, inexorable plongée dans l'obscurité de fosses Marianne dont il extrait l'énigmatique et déchirante beauté. Joyau d'un funeral doom plus tragique que dépressif, Transitions ouvre un nouveau chapitre pour Arche, qu'on espère durable et régulier. (15.01.2023) ⍖⍖⍖
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