21 janvier 2019

A lire | Un regard froid - Palinodie (Anticinéma) (2018)


Après le "Enclave I" de Camecrude, Cioran Records nous offre en pâture, "Palinodie", sous-titré "Anticinéma", nouvelle décharge de haine du Canadien Un regard froid, deux pulsations très différentes l’une de l’autre tant dans la forme que dans le fond mais qui partagent pourtant une brutalité commune qui les rend extrêmement éprouvante à déflorer. Loin d’une écoute confortable, les pénétrer déclenche nausées et vomissements en une jouissance malsaine. Artiste complet et total, Frederick Maheux manie à la manière de scalpels trempés dans la rouille, la caméra aussi bien que les collages, les images aussi bien que le son sans oublier des textes dont les maux résonnent comme des cris de haine et de dégoût. Une folie contaminatrice ronge telle une gangrène ces différents modes d’expression qu’il utilise pour dépeindre une société malade, atteinte d’un cancer en phase terminale.

Par le biais d'Un regard froid, son projet sonore et bruitiste, le Québécois trouve le canal lui permettant de faire copuler cruauté extrême et noirceur crapoteuse, ouvrant les vannes d’un torrent fielleux qu’aucun barrage ne vient jamais endiguer. "Palinodie" repousse les limites de l’audible et à leur chères études bon nombre d’"artistes" qui jouent à qui sera le plus hargneux, le plus violent. Ils peuvent d’ors-et-déjà abdiquer face cette déflagration dont prétendre qu’elle est rude tient du doux euphémisme, morceau de viande avariée qui dégueule des toxines hallucinées. Bouillonnant dans ses entrailles d’un mal atavique, cette création fait plus que ruminer mort et pessimisme, elle n’est en fait que destruction et négation en cela qu’elle draine un nihilisme aussi radical que démentiel en un flot ferrugineux de moisissures sanglantes. Enfoncé dans le charnier furieux d’un power electronics viscéral chargé d’émanations death industriel, "Palinodie" perturbe, arrache tout sur son passage, racle les chairs putréfiées, arase la terre en ne laissant que des ruines. Laide et dérangeante, l’œuvre a quelque chose d’un viol auditif dont les lacérations brutales et martiales font saigner les muqueuses. A l’instar de "Enclave I", sa durée parait bien plus longue qu’elle n’est en réalité mais en venir à bout tient de la flagellation. De fait, il y a presque une dimension religieuse - dans sa définition la plus aliénée et charnelle - voire métaphysique, dans cette masse hurlante dont on ne peut s'extraire indemne. Associé à un déluge pollué, le chant, agressif et bilieux, crache des échardes ensanglantées en broyant les mots en une invective qui frappe en pleine gueule.  Le résultat est à prendre - ou à rejeter - pour ce qu'il est, bloc meurtri d'hystérie pure et de négativité autoritaire.  (09/01/2019) ⍖⍖⍖


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