Si
nous n'en savons toujours pas plus au sujet de cette obscure entité, une chose
est cependant certaine, Arbre demeure plus que jamais cette créature intrigante
dont chaque nouvelle offrande semble l'enfoncer toujours un peu plus dans les
profondeurs d'une désolation hivernale. Après avoir croisé le fer avec son
compagnon de label, Brouillard, l'entité revient hanter nos nuits froides avec
un troisième opus tout simplement baptisé III. Visuels glacials à l'identique,
composés de forêts pétrifiées sous la neige, pistes toujours anonymes que
distinguent une simple numérotation et un style, entre DBSM et ambient black
metal, (faussement) figés dans la terre gelée, n'aident certes pas à différencier
ses créations, lesquelles forment en revanche un tout, corpus d'albums qui peu
à peu se construit, reliés entre eux par le numéro des morceaux qui se suivent
à la manière de chapitres successifs. Nous nous étions arrêtés au titre XII
avec Brouillarbre (2015), c'est donc en toute logique que ce nouveau méfait
rassemble les compos de XIII à XVI, plages au nombre de quatre donc, en une
architecture à la fois compacte et déliée qui le rapproche de son devancier
longue durée. De fait, éditée encore une fois par Distant Voices, qui reste
fidèle à son exigence formelle, l'oeuvre ne surprend pas, creusant le sillon
métronomique d'un art pulsatif d'une noirceur saccadée dont les fondations ont
été établies par les deux premiers disques. Pour autant, III se distingue de
son prédécesseur comme celui-ci en son temps vis-à-vis de son séminal aîné. Et
alors que nous aurions pu craindre l'affleurement de limites évidentes, la bête
mystérieuse réussit toujours à se renouveler avec discrétion, en injectant à sa
partition d'une intensité hallucinée, des nuances que seules de nombreuses
écoutes aident à déceler, permettant ainsi de fissurer ce bloc de matière
organique. Ainsi, quoiqu'elles s'enchaînent les unes aux autres en un torrent
cataclysmique, chaque plainte se dévoile par petites touches pointillistes,
XIII et ses prémices acoustiques et pluvieuses, sans oublier les chœurs
majestueux qui l'émaillent, le colorant de teintes presque païennes, XIV, ses
riffs pollués qui raclent la peau tel un scalpel trempé dans la rouille et sa
trame meurtrie tour à tour contemplative ou fielleuse, que griffe cette voix
écorchée, lointain et inaudible cri de haine. Pulsation démentielle aux sentes
sinueuses, on tient d'ailleurs là très certainement l'apothéose de cette
signature à la négativité bourgeonnante. Même réussite orgasmique avec XV, lui
aussi hanté par une solennité souterraine et vrillé par des accords
squelettiques ou ferrugineux en une trajectoire orageuse. Enfin, le terminal
XVI est fait d'un tonneau identique, avec une lente introduction avant
l'éjaculation syncopée et martiale. Les habitués de ce mystérieux projet ne
seront pas déçus. 3.5/5 (2016)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire