20 novembre 2016

KröniK | Boar - Veneficae (2015)


Il y a déjà cet écrin visuel à la beauté troublante dont le personnage semble nous attendre, nous guetter, passeur mystérieux entre deux mondes, peut-être celui des vivants et celui des morts. Il y a surtout cet art de la douleur plombée qui a l'intelligence de s'affranchir des étiquettes, des catégories, de ces sous-genres qui ne servent à rien si ce n'est à mettre un nom sur les différentes faces d'un même édifice de sueur et de cendres, de larmes et de sang. Tel est « Veneficae » seconde enclume d'un groupe méconnu qui ne le restera plus très longtemps, soyez-en convaincus. On comprend donc très vite pourquoi l'estimable label Lost Pilgrims Records, lequel est d'ailleurs en passe de devenir l'un de nos pourvoyeurs préférés en pilules qui donnent la trique des grands jours, a jeté son dévolu sur ces Finlandais dont l'album prendra naturellement place entre ceux de Mudbath ou de Deuil avec lesquels il ne partage pas seulement une propension identique à faire trembler les murs mais aussi une même capacité à repousser les limites. Insaisissable, Boar brouille les cartes qu'il mélange pour les redistribuer à sa manière, rude et pesante, épaisse et accrocheuse. Jamais là où on ne l'attend vraiment, le groupe mélange en une recette grumeleuse, doom, stoner, sludge, adoucie par une savoureuse touche de rock psyché. Capable de moissonner un large public, « Veneficae » se révèle être un opus riche d'une vicieuse ambivalence dont la lourdeur minérale s'exprime de maintes façons, comme si les Finlandais cherchaient à réaliser la synthèse des différents courants de ce même famille sonore. Amorce tendue comme une verge turgescente, 'Old Grey' illustre parfaitement ce goût pour les courbes, pour les chemins sinueux, loin de la rassurante ligne droite. Après un début marqué par un Sludge abrupte, le titre se voit perforé par une déchirure (presque) instrumentale sur fond de roulements de toms telluriques cependant que les guitares tricotent une toile démentielle dont les fils ont des allures de câbles. En six minutes, les Finlandais réussit déjà le pari de faire exploser les carcans. 'Witch Woman', qui lui succède, possède les atours du Stoner graisseux aux confins d'un trip cosmique que des growls viennent très vite polluer pour un résultat halluciné. Le reste est du même tonneau, gravitant quelques part entre Doom épileptique et Rock psyché dégueulant le fuzz par tous les pores ('Sand') jusqu'au terminal 'Wolf Lord' lequel, du haut de ses neuf minutes au garrot renvoie tout ce qui l'a précédé dans le bac sables des inoffensifs, pulsation aussi noire que charbonneuse au tempo englué dans la terre et dont les ultimes mesures au bord de la rupture frôlent le point G. La messe est dite. Après quasiment cinq ans d'absence seulement brisées par un split et un EP, Boar assure son retour, s'imposant comme un des maîtres de la musique de bûcheron. 3.5/5 (2015)


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