En
l'espace de quelques années et deux albums, Seremonia a su graver dans la glace
son nom et une signature étrange entre
doom occulte et heavy psyché, le tout teinté de prog au goût de champignons et
devant une bonne part de son magnétisme au chant habité de Noora Federley. Si
"Ihminen" faisait déjà mieux que transformer l'essai après l'éponyme
séminal et prometteur, "Kristalliarkki" enfonce encore davantage le
clou, rétrogradant du coup ses devanciers au rang de simples ébauches. Le style
reste inchangé, quoique d'une noirceur plus affirmée. Format (presque toujours)
resserré, ambiances froidement forestières, textes en finnois et récit à la
progression tranquille définissent ainsi une bande-son aussi mystérieuse que
singulière en cela qu'elle puise dans le passé sans pour autant paraître
anachronique sinon nostalgique, à des années-lumière donc de la mouvance
vintage actuellement en vogue. Non, chamanes fantomatiques, les Finlandais nous
convient à un voyage aux confins du fantastique, nimbé d'atmosphères irréelles
dont le point G est incarné par la première partie du diptyque terminal
'Kristalliarkki', lequel voit ses géniteurs rompre avec leur cadre familier
pour baguenauder sur des terres franchement progressives, pulsation de près
d'un quart d'heure où orgue antédiluvien, saxophone déglingué, guitare d'une
force noire et flûte boisée communient en une sarabande obscure, crépusculaire.
Alors que nous ne l'attendions pas sur
ce terrain dilaté et évolutif ô combien
casse-gueule, Seremonia se montre, et contre toute attente, tout du long
impérial, au point de nous faire espérer que cet exercice ne demeure pas sans
lendemain. Résumer ce troisième album à cette seule pièce serait bien entendu
injuste, eu égard au reste du menu qui oscille entre déambulations plombées
('Musta Liekki', Vapauden Polku' et ses claviers aux couleurs du Pourpre
Profond) et envolées plus nerveuses qu'à l'accoutumée, comme l'illustrent
'Kuolema Voittaa', le fuzzy 'Luciferin Lapset' ou bien encore le (quasi)
inaugural et percussif 'Alfa Ja Omega'. En découle une offrande plus variée,
plus nuancée également, que ses deux aînées. Plus ambitieuse surtout de par son
expression à la fois aventureuse et sombre. Ce faisant, les Finlandais sont
devenus grands. On savait depuis leurs débuts qu'il faudrait compter sur eux,
"Kristalliarkki" en livre l'éclatante confirmation ! 4/5 (2015)
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