Il
y a quelque chose de sale, de rugueux, de âpre, dans ce Sludge Hardcore trempé
dans la boue, la sueur et le stupre. Quelque chose de vicieux surtout qui
commence déjà à suinter de ce visuel cendreux et superbe, celui qui habille ce
premier méfait de Lost Pagan, groupe basé à Amiens qu’animent des mecs issus de
Sleeping Village Orchestra et d’Anorak. Bref, du lourd, du méchant, du qui
montre les crocs. Avant même de voir la rondelle avalée par les ténèbres de la
chaîne hifi, la certitude de recevoir dans quelques instants une grande claque
dans la gueule s’impose d’emblée. A raison. Sournois, les gars repoussent
pourtant l’explosion, retenant cette éjaculation de haine presque jusqu’au bout
de l’introductif ‘Living Grave’, (quasi) instrumental ultra heavy aux relents
de boyaux qui charrie une énergie souterraine. Puis le chant surgit
brutalement, dégueule sa bile malsaine, point de départ d’une course en avant
teintée d’un nihilisme poisseux. Dès lors, plus jamais la tension ne faiblira,
dressant une verge gonflée d’une semence maladive (‘Dirty Face’). Aux confins
d’un doom testiculeux, le groupe érige un bloc de matière brute et noire,
monolithe aux racines noueuses, planté au milieu d’un champ de ruines. Si le
tempo reste souvent englué dans le désespoir, l’ambiance qui règne tout du long
n’en demeure pas moins extrêmement brutale, presque viscérale, à l’image du
chant qui semble hurler comme si demain ne devait plus exister (‘Glass Of
Blood’). Loin d’en altérer la vicieuse intensité, les rares accalmies ouvrent
au contraire des portes vers un puits de noirceur sans fin, témoin ce ‘Growing
Monster’, étonnante pulsation dont la première partie faussement posée sert de
préliminaires à un déchaînement atrabilaire. Que dire enfin du terminal et bien
nommé ‘Insane Story’ ? Soit huit minutes gravitant au bord du chaos dont on ne
sort pas tout à fait indemne. A l’image de cet album qui ne donne qu’une envie,
celle de tendre l’autre joue. 3.5/5 (2015)
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