Maladroitement
arrimé à ses débuts à la scène stoner, parce que son leader, JB
Christoffersson, venait alors d'être recruté par Spiritual Beggars et qu'il
était hébergé chez Rise Above, le label de Lee Dorrian (Cathedral), Grand Magus
s'est très vite employé à effacer cette étiquette qui ne lui correspondait pas,
même si son premier album éponyme pouvait justifier cet ancrage, de par ses
atours assez gras. Davantage que le doom, avec lequel il partage néanmoins ces
traits rugueux, c'est un heavy pur et dur qui coule dans les veines du trio,
metal traditionnel qu'il nourrit au sein d'une muse viking chère à son cœur.
Entre Manowar et le Bathory le plus épique, il balance son glaive trempé de
sang. Sculptée dans la roche froide et tranchante d'un fjord majestueux, son
identité a été véritablement fixée à partir de "Iron Will" en 2008.
Depuis, tous les deux ans, avec une appréciable régularité, les Suédois nous
gratifient d'une nouvelle offrande faite à Odin, sans jamais vraiment décevoir.
Reste que, succédant au grandiose "The Hunt" (2012), "Triumph
And Power" a paru montrer un drakkar certes toujours efficace mais
commençant quelque peu à faire du surplace. Après ce qu'il est permis de
considérer comme un simple album de plus, "Sword Songs" vient nous
rassurer, ouvrant des serres fourchues prêtes à capturer sa proie. Le chanteur
a affirmé que ce huitième opus marquait le retour à une forme d'agressivité. Force
est de reconnaître que le bougre n'a pas menti. Plus abruptes et directes –
seule l'une d'entre elles dépasse vraiment la barre des cinq minutes au
compteur - que leurs devancières, ces nouvelles compos vont à l'essentiel,
propulsées par une force minérale comme venue du fond des âges. Vierges de
quelconques artifices, elles palpitent d'une sève ferrugineuse qui leur confère
cette puissance authentique à laquelle leurs auteurs sont attachés. Un regain
(relatif) de rapidité et d'énergie ne fait certes pas un bon disque mais,
associé à une créativité au garde-à-vous, cette hargne retrouvée se solde par
une incontestable réussite qu'incarne une poignée de très grands titres. Parmi
ceux-ci citons pour commencer 'Freja's Choice', entame mythologique aux lignes
de guitare jouissives, 'Forged In Iron - Crowned In Steel', qui permet encore
une fois à JB de démontrer qu'il est bien un des meilleurs vocalistes de sa
génération, ce dont témoigne également la reprise fidèle du 'Stormbringer' de
Deep Purple en guise de conclusion, où il n'a aucun mal à se frotter à l'organe
de Coverdale mais n'égale pas en revanche Blackmore dont le toucher reste de
toute façon inimitable. Valhalla de l'album, 'Born For Battle (Black Dog Of
Brocéliande)' affiche les traits les plus lourds de Grand Magus, également de
mise sur le granitique 'Master Of Land', que tire vers la terre le jeu de
batterie de Ludwig Witt (Spiritual Beggars). Plus qu'à la vélocité annoncée,
"Sword Songs" fait la part belle aux mid-tempos charriant des ambiances
mélancoliques à l'image de 'Every Day There's Battle To Fight', sorte de
power-ballade empreinte de majesté, coulée dans le sang et le fer et qu'éclaire
un solo félin de toute beauté. Et au final, si cet album se veut plus brut que
son prédécesseur, il confirme avant toute chose une lente évolution vers un
hard rock d'une gravité épique. 4/5 (2016)
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