24 juin 2023

KröniK | Mar de Grises - The Tatterdemalion Express (2003)




Derrière ce titre énigmatique se cache la première offrande de Mar De Grises, formation au nom tout aussi mystérieux. Signé chez Firebox, une des plus actives chapelles dans le genre, le groupe officie dans le funeral doom comme la plupart de ses compagnons de label (Tyranny, Pantheist…) mais son origine géographique – l’Amérique Latine et le Chili pour être plus précis – lui confère une singularité lui permettant de se différencier quelque peu des autres prêtres du doom. Ce serait sans doute mentir que de prétendre que cette nationalité, peu portée, à priori, sur ce style (hormis Fungoid Stream et Mythological Cold Towers), transparaît dans la musique proposée sur cet essai. Mais cet éloignement de l’épicentre du doom, à savoir l’Europe du Nord et la Grande-Bretagne, lui octroie une originalité certaine. Ni pompé sur l’école anglaise de la première moitié des années 90 (My Dying Bride, Anathema…), ni émule de la spéléologie extrême à la Scandinave, Mar De Grises façonne un art de la douleur qui n’appartient de fait qu’à lui et nous convie à un voyage funèbre dont lui seul à la clé. 

Il développe un sens de l’atmosphère, de l’emphase proprement vertigineux qui rend son doom funéraire épique, mélodique et d’une beauté contemplative immense, dont le romantisme tragique résonne comme un cri d’abandon (« Recklessness ») . Fidèles aux règles du genre, les morceaux sont généralement très longs se nourrissent d’une tristesse infinie et poignante (« Onirica ») porteuse d’un désespoir total que tissent des lignes de guitares entêtantes enlacées à un clavier qui colore l’ensemble de touches progressives, voire symphoniques (l’instrumental « Self Portrait n° 1 »), savamment distillées. On ne peut qu’être impressionné par la maîtrise de ces jeunes musiciens, nés qui plus est dans un pays du Tiers Monde, qu’une seule démo, gravée en 2002, a suffi à  faire repérer. Des monstres tels que « El Otro », « Storm » et « B Welcome Oh Hideous Hell », saturés de strates sonores d’une densité extrême, ne peuvent que séduire et forcer le respect de tous doomers en mal d’ambiances suicidaires. Loin du monolithisme que le doom exige parfois, ces complaintes fourmillent de détails luxuriants qui prolifèrent et finissent par les contaminer. On attend maintenant que Mar De Grises transforme l’essai. A suivre de très près donc. (04.10.2007) ⍖⍖⍖

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