13 mai 2021

CinéZone | Richard Lester - Terreur sur le Britannic (1974)




Habitués à voir les Américains usiner des films catastrophe dans les années 70, nous sommes alors étonnés quand les Anglais s'essaient à cet exercice. Mais Terreur sur le Britannic est-il réellement un rejeton de ce genre d'un autre temps ? De loin, il en égrène tous les codes avec son éventail de personnages et son gigantesque navire fendant une mer déchaînée et menacé par des bombes nichées dans ses entrailles. Mais Richard Lester n'est pas un tâcheron qui se contente d'entrer dans une case bien définie pour ne plus s'en extraire même si, à l'époque du tournage, le projet incarne pour lui l'occasion de renouer avec un succès qui l'a déserté depuis Petulia (1968) et surtout l'incompris L'ultime garçonnière (1969). Récupérant le matériau tout d'abord passé entre les mains de Bryan Forbes et de Don Medford, Lester s'empare d'un sujet à priori éloigné de ses préoccupations coutumières. Plus sage que dans les années 60, il s'en amuse pas moins à égratigner gentiment le genre par de menus détails qui peuvent sembler anodins mais illustrent le fossé qui sépare le cinéma anglais de celui de son ancienne colonie. L'humour (les bonnes soeurs qui s'inquiètent des douches collectives), les besogneux qui nettoient le pont une fois le bateau en mer, ces cuisines où le personnel s'active et balance toute la bouffe gaspillée, le steward d'origine arabe, fonctionnent ainsi comme des petites touches réalistes trahissant les idées à consonance sociale d'un véritable auteur alors que le maladroit Roy Kinnear n'est parfois pas loin de pousser le film sur le terrain de la parodie. Juggernaut n'en assure pas moins un spectacle riche en suspense, qui tient parfaitement en haleine, entre l'enquête menée par Scotland Yard pour identifier le terroriste et les scènes de désamorçage. Il est en cela, encore une fois, typiquement britannique dans le travail froid et solide dont il fait montre. A ce titre, il embarque quasiment tout le cinéma anglais d'alors, des vedettes (Richard Harris, David Hemmings) aux futurs grands (Anthony Hopkins, Ian Holm) en passant par tous ces visages familiers qui font le charme et la grandeur du 7ème art de la Perfide Albion, (Roy Kinnear donc mais aussi Freddie Jones, Jack Watson, Julian Glover) sans oublier Shirley Knight, un Clifton James étonnamment sobre et même Omar Sharif. Armé d'une mise en scène inventive qui voit la caméra se faufiler avec une aisance identique dans les coursives étroites d'un bateau secoué par la houle que dans des intérieurs londoniens,  Lester accouple le burlesque au drame, la tension à l'émotion, ce qui explique pourquoi Terreur sur le Britannic a bien mieux vieilli que les autres films catastrophe dont il ne fait donc pas vraiment parti, plus proche des Loups de haute mer que Andrew V. McLaglen réalisera cinq ans plus tard. (vu le 31.12.2020) ⍖⍖⍖






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