Fresque longue de près 150 minutes, La conquête de l'Ouest balaie cinquante ans d'histoire de l'Ouest américain entre 1830 et 1880, à travers la destinée d'une famille de pionniers que les évènements vont désagréger. Gros succès commercial et triomphe aux Oscars, ce western demeure célèbre moins pour son recours à l'éphémère procédé du Cinérama (technique utilisant une caméra à trois objectifs) qu'à son affiche pantagruélique avec laquelle ne peut guère rivaliser que celle du Jour le plus long, tourné la même année. Trois metteurs en scène parmi les plus grands spécialistes du genre (Henry Hathaway, John Ford, George Marshall) et quasiment toutes les vedettes (masculines) d'Hollywood ont été convoquées pour rendre hommage à ceux qui ont façonné ce pays. Seuls Kirk Douglas, Burt Lancaster ou Robert Mitchum manquent à l'appel. Pourtant, à l'arrivée, La conquête de l'Ouest échoue quelque peu à être le grand film qu'il aurait dû être, la faute à une incapacité à convertir à l'écran de bonnes idées en qualités. Confier les différents épisodes du récit à plusieurs réalisateurs était intéressant mais le résultat se révèle inégal. Les sketchs assurés par Hathaway (Les rivières, Les plaines, Les hors-la-loi) semblent être les plus réussis car les plus mouvementés alors que celui de Ford consacré à la Guerre de Sécession possède un goût d'inachevé, alourdi qui plus est plus par son pesant appel à la fraternité. De même, le scénario que signent James R. Webb et John Gray, résume habilement les grandes étapes de la conquête de l'Ouest et les relie adroitement, mais ne fait en définitive qu'effleurer chaque aspect de son vaste sujet. D'où l'impression que, hormis les deux premières parties, que dominent chacune à tour de rôle les deux soeurs Prescott (interprétées avec beaucoup de charme par Carroll Baker et Debbie Reynolds), le reste est bâclé. Enfin, employer tous ces grands acteurs est jubilatoire mais entre un James Stewart trop vieux pour son rôle, un John Wayne dont la présence se réduit à une seule scène, un Richard Widmark qui écope du personnage (évidemment) antipathique du patron du chemin de fer ou un Henry Fonda qui n'a pas grand chose à faire, ce sont donc surtout les comédiennes ainsi que George Peppard qui marquent les esprits. Pour finir, en 1962, alors que le cinéma américain est traversé par une profonde mutation qui le pousse sur la voie d'un plus grand réalisme et donc à s'éloigner d'une vision pittoresque et romanesque, La conquête de l'Ouest apparaît déjà comme une production anachronique, à la morale empesée et aux référence biblique appuyées (l'Ouest comme Terre promise, les deux sœurs baptisée, Eve et Lilith). A titre de comparaison, Sam Peckinpah se fend la même année de Coup de feu dans la sierra et deux ans plus tard de Major Dundee qui ont quand même une autre gueule ! Mais il ne faut cependant pas bouder notre plaisir face à ce (grand) spectacle qui demeure très agréable à regarder. (Vu le 02.01.2021) ⍖⍖⍖
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