22 février 2021

KröniK | Ordinance - In Purge There Is No Remission (2020)




Le black metal en provenance du pays des mille lacs déçoit rarement, dépôt d'une identité bien particulière, la forme à la fois nocturne et mélodique, le fond souvent diabolique ou le bras tendu vers la mouvance honnie du NSBM, tissant des connections aussi bien avec le doom qu'avec le power electronics. Ordinance a donc vu la nuit en Finlande mais pâtit, malgré une quinzaine d'années d'activisme, d'une renommée  toujours modeste, la faute à une discographie pour le moins rachitique, longtemps incarnée par une démo séminale en 2007 puis un premier long baptisé Relinquishment en 2014 et aujourd'hui enfin enrichie par ce In Purge There Is No Remission quasiment venu de nulle part. Sans doute Lauri Laaksonen, musicien pieuvre, était-il trop occupé ses dernières années par Desolate Shrine et Convocation (avec lequel il a sorti du four cet été l'excellent "Ashes Coalesce"), pour accorder le temps nécessaire à ce projet encore confidentiel dont il n'est cependant que le batteur aux côtés de Arttu Ratilainen qui en tient les rennes, chanteur, guitariste et bassiste au pedigree nettement plus obscur. Ce deuxième effort permettra-t-il au duo de s'extraire de la pénombre dans laquelle il végète depuis sa naissance ? 

L'opus n'est pas sans qualité, les tentacules plantés dans ce terreau ténébreux typiquement finlandais, le tranchant de mélodie entêtante n'est jamais sacrifié sur l'autel d'une vélocité qui néanmoins emporte tout dans son sillage ('Diabolopathia'), exception faite du curieux mais à demi réussi 'Gesticulation Of Death', lente déambulation qu'une entame osseuse pousse ensuite sur une sente boisée avalée par la nuit. Quand ils misent sur l'agressivité , les deux gaillards dressent alors une redoutable turgescence dont le méat crache une noirceur abrasive, à l'image des 'Obstructed Paths' et autre 'Gathering Wraiths', d'une efficacité certes éprouvées mais irrésistible. Et lorsque 'Credo Sceleratum' les voit serrer le frein à main, les ténèbres écartent leurs lèvres béantes, laissant échapper des miasmes morbides. On aime un peu moins en revanche les (rares) vocalises aigües ou les chœurs enivrants qui tombent comme un cheveu païen sur la soupe, témoin un 'The Kingdom Of Nothing' qui galope dans de nombreuses  directions, la boussole devenue folle. Dommage car ce titre est pourtant parsemé de bonnes idées pour un résultat mitigé que partage aussi le trop long 'Purging Kremanation', conclusion qui s'égare sur près de douze minutes. L'actif l'emportant sur le passif, In Purge There Is No Remission n'en fait pas moins honneur à ses origines finlandaises. Gageons qu'avec l'exposition étendue que lui apporte le label The Sinister Flame et à condition qu'il éjacule sa semence avec une régularité plus soutenue et s'il se montre capable de canaliser ses influences, Ordinance devrait alors pouvoir graver son nom dans le marbre de cette chapelle impie. En l'état, il est déjà une formation solide dont le travail s'écoute avec une jouissance non feinte. (14.10.2020 | LHN) ⍖⍖

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