16 mars 2016

Sula Bassana | Shipwrecked (2016)


Grâce à Sula Bassana, on ne se sent jamais seul bien longtemps, l'homme ayant pris l'habitude de nous rendre visite au moins plusieurs fois par an, en solitaire ou accompagné. De fait, nous avons cessé de compter le nombre d'albums, en studio ou sur scène portant son nom celui d'un de ces nombreux projets. Bourgeonnant de toute part, sa carrière devient peu à peu aussi grosse que le bottin. S'il n'est pas si évident que cela de distinguer Electric Moon, Zone Six et Krautzone, lesquels se partagent, à quelques nuances près, les mêmes musiciens, en un line-up à géométrie variable, l’œuvre personnelle du guitariste (mais pas que), quant à elle, ne ressemble pas à celle de ses autres groupes, quand bien même elle décolle comme les autres très loin vers les étoiles, gravitant entre kraut et space rock mais avec toujours cette influence électronique qui reste la signature de l'Allemand en solo. Après des débuts hésitant entre ambient (« Silent Music ») et progressif à la Manuel Göttsching (« Endless Winter »), son style s'est véritablement fixé à partir de « The Night », exploration spatiale aux confins d'une trance cosmique, évolution poursuivie par « Kosmonauts » et confirmée aujourd'hui par « Shipwrecked ». Mentionner le visuel, superbe par ailleurs, qui lui sert d'écrin n'est pas anecdotique car de part ses atours galactiques, il renvoie à toute une frange de la science-fiction, celle de Perry Rhodan, héros dont les aventures ont nourri l'imaginaire de Sula Bassana et auquel il a rendu hommage avec le titre qui porte son nom sur l'album « Dreamer ». Muse généreuse évocatrice de paysages lunaires mystérieux ou menaçants, cette S.F. Kitsch et aventureuse sert de rampe de lancement à ce psychedelic ethnotronic space rock  d'une démesure hypnotique. Seul à la barre, notre homme se charge de tout, comme de coutume, utilisant une grande variété d'instruments (guitare, basse, sequencer, synthétiseurs...), desquels s'échappe un tapi d'effluves électroniques sombres et froides à la fois. Ondes robotiques, sonorités stellaires et nappes hantées, offrent une tessiture aux teintes étranges. L'album rassemble six titres dont trois d'entre eux voisinent avec les dix minutes au compteur, le reste affichant une durée plus courte. Le voyage démarre  avec 'Moonbase Alpha Alpha', pulsation entêtante rempli de bidouillages et d'effets qui nous plongent d'emblée dans un décor de conquête spatiale. Plus inquiétant se veut "Shushie Express" qui nous convie à l'exploration d'une planète inconnue et que peuple une myriade de sons venus d'ailleurs. Si 'No Time : No Eternity' marque une pause par sa lenteur, titre ambient que drapent des nappes de Mellotron, 'Planeta Bur' se rapproche des deux premiers titres tout en laissant échapper des oscillations nébuleuses  qui tel un mantra semblent se répéter à l'infini. Etonnamment, le programme s'achève sur deux courtes pistes dont le titre éponyme, gorgée d'une absolue tristesse, manière de conclusion douce-amère, comme si l'aventure se soldait par la mort. Entre "Kosmonauts" pour son ressac électronique et "Dark Days", pour sa mélancolie discrète, "Shipwrecked" est encore un grand disque signé Sula Bassana dont la sève paraît décidément intarissable... (2016)


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