En
dépit de la présence de Rogga Johansson, mercenaire bien connu du death metal
suédois old school, sur le séminal "Burden Of Grief", The 11th Hour
reste avant toute chose le projet personnel de Ed Warby, batteur hollandais au
pedigree long comme un dimanche de pluie où le progressif (Ayreon, Star One)
côtoie du plus brutal (Gorefest, Demiurg...), désireux d'épancher sa soif d'un
doom death solennel. De fait, le départ du Suédois, toujours incapable de poser
ses valises bien longtemps au même endroit, ne change rien pour le groupe,
comme en témoigne "Lacrima Mortis", seconde (et à ce jour dernière)
offrande, gravée presque trois ans après sa devancière. Cette fois-ci, c'est Pim
Blankenstein qui est chargé d'enténébrer les compositions ciselées par le Batave
et de lui répondre avec son organe caverneux. Réussit-il mieux que le
Scandinave à couler ces ambiances désespérées dans les profondeurs aveugles des
Fosses Marianne ? Le grain de sa voix, plus abyssal que rugueux, bref en un
mot, plus doom, confère une couleur plus sentencieuse encore à cette procession
inexorable à travers la nef d'une cathédrale abritant toute la misère du monde.
Le style de The 11th Hour, esquissé au burin sur "Burden Of Grief",
demeure intact, figé dans la tradition doloriste à la hollandaise à laquelle le
chant limpide de Warby, pinceau omniprésent, apporte une clarté qui ne
s'impose sans doute pourtant pas, quand bien même, l'identité du projet ne
réside en définitive que dans cette ambivalence vocale, ce clair-obscur où les
mélodies se fondent dans une tristesse funéraire. Grâce à ces guitares plombées
aux allures de vigies perçant la brume et aux gorges profondes de Pim, la
mortification sied pourtant mieux au duo qu'un lyrisme parfois presque
sirupeux. Du coup, on viendrait à souhaiter que Warby musèle sa voix pour
laisser seul son comparse forer la terre froide de ce cimetière trop propre
pour nourrir le spleen des plus dépressifs d'entre-nous. Il suffit de s'abîmer
dans les méandres plombées d'un 'Nothing But Pain' pour mesurer combien les
vocalises du chanteur de Officium Triste se suffisent à elles-mêmes. Cette
réserve énoncée, reconnaissons la très belle tenue de "Lacrima
Mortis" qui, s'il ne sculpte pas tout à fait le morbid doom annoncé
par le label Napalm Records, n'en
demeure pas moins un opus parfaitement maîtrisé dont les aplats mélodiques
envoûtent tels les funestes mélopées de sirènes engourdies, justifiant les
regrets de voir peu à peu s'endormir dans la tombe ce projet riche de
promesses, aucun nouvel album n'ayant vu le jour depuis. Dans la droite lignée
de son prédécesseur, cette seconde hostie est écartelée entre lumière et
noirceur, crypte d'un doom plus mélodique que mortifère. 3,5/5 (2016)
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