2 juin 2016

Malcuidant | Et la terre brûla... (2015)


On peut être viscéralement attaché aux valeurs qui ont fait - et font encore - la grandeur de l'art noir et ne pas vouloir sacrifier sur l'autel du evil et primitif à tout prix, puissance et mélodie. Malcuidant en constitue une superbe démonstration, groupe dont la sincérité se conjugue à une admirable exigence. De loin, celui qui fait désormais office de vétéran, ayant vu la huit il y a déjà presque vingt ans, pourrait se confondre avec toutes ces hordes de true black avec lesquelles il partage de sinistres apparats. De près pourtant, la réalité se révèle plus nuancée comme en témoigne Et la terre brûla..., troisième offrande dont l'impériale réussite s'impose comme une incontestable vérité. Le fait que ce soit Apparitia Recordings, sous-division de Drakkar Productions, qui l'édite, comme son prédécesseur Et les cieux s'assombrissent..., est en ce sens un signe qui ne trompe pas quant à sa valeur et à sa teneur. Malcuidant honore, sublime même, un Black metal plus éternel que traditionnel, brutalement épique et s'enracinant dans la terre sombre et ensanglantée de notre passé. Les textes dans la langue de Molière participent autant d'une poésie lugubre que d'une forme de grandeur, âpre et crépusculaire. Mais ce qui frappe avant tout à l'écoute de cette hostie est sa prise de son dont la pureté ne l'exonère pas d'une patine froide et obscure. La basse, en particulier, claque comme un fouet qui mord la chair. Brillant d'un lustre séculaire, l'écriture s'avère remarquable, oeuvre de musiciens aguerris qui possèdent une vision de leur art. En quarante minutes, les Français forgent ainsi dans la roche glaciale de montagnes inquiétantes drapées d'un suaire brumeux, des compositions tumultueuses qui creusent de vastes paysages au pouvoir d'évocation immense, à l'image de Mortelle et froide, monumentale entame irriguée par des lignes envoûtantes desquelles suinte une profonde mélancolie. Ce titre, sans doute le meilleur du lot, sert de patron aux cinq autres ruminations, à la fois torrentielles dans leur funeste et furieuse ascension et gonflées d'une sève puissamment mélodique. Si parfois, les atmosphères, lentes et hivernales, s'installent, elles sont toutefois très vite balayées comme un fétu de paille par une force minérale venu du fond des âges, tel ce Ornements de ténèbres dont la vélocité se pare d'une désespérée beauté. Tranchant et rocailleux, ces morceaux à l'écriture ciselée, redonnent toutes ses lettres de noblesse et son lustre empreint d'une ténébreuse gravité, à ce black metal héritier d'une longue lignée. Et la terre brûla... est un très grand disque. 4/5 (2016)


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