Quand certains malchanceux mettent des années à percer, d'autres au contraire ne perdent pas de temps pour s'imposer. Kadavar est de ceux-ci. Nonobstant les incontestables qualités du combo, sur lesquelles nous reviendrons un peu plus loin, il est tout de même permis de se demander si ce succès-éclair est justifié. Certes le premier album éponyme était bon, voire excellent, certes les concerts livrés par le trio l'ont été tout autant mais pas plus que d'autres... Seulement voilà, les Allemands possèdent quelque chose en plus, une espèce de magie qui, couplée à une énergie jubilatoire, à un sens du feeling (hard) rock humide et à une écriture imparable, aboutit à un Graal orgasmique. Bien que simple en apparence, leur art sonne comme une évidence, celle d'écouter une musique noble et pure qui confine à une forme d'Absolu. Mais, "Abra Kadavar", en ne transformant pas tout à fait l'essai, semblait néanmoins déjà dévoiler de relatives limites. Moins de magie, moins de surprise. Le troisième opus, sans compter un split forcément culte partagé avec Aqua Nebula Oscillator, se devait donc d'être à la hauteur de l'attente. Ce qu'il fait. Mais, cela, on l'avait déjà deviné car il y a des indices qui ne trompent pas. Son titre court, qu'on retient immédiatement, évocateur d'un foisonnement créatif, en constitue un premier et pas des moindres. Sa pochette, très belle, en est un second, annonciatrice par ailleurs de l'évolution du contenu dont elle est l'écrin en ce sens qu'elle tranche avec ses devancières où trônaient sobrement les trois membres du groupe. Par petites touches pointillistes, Kadavar poursuit sa mue, moins doom et tout simplement plus rock et bluesy ('Filthy illusion', 'Pale Blue Eyes'). L'écriture s'est resserrée et sent moins la pipe à eau, diluant les touches psyché certes toujours présentes ('Spanish Wild Rose'), dans un socle plus direct, quand bien même les mélodies accrocheuses sont depuis toujours une des marques de fabrique du trio emmené par le chanteur et guitariste Lupus, lequel se montre ici particulièrement en forme et plus inspiré que jamais, laissant sa gratte déverser un feeling torrentiel, rampe de lancement à des soli dantesques en live. Premier opus avec le nouveau bassiste, Dragon, "Berlin" enfile les perles sans jamais ramollir, allant toujours à l'essentiel (tout est emballé en quatre minutes au compteur), parfois rapide à l'image de 'Lord Of The Sky' ou de 'Into The Night', mais serrant le frein le plus souvent ('Last Living Dinosaur') et toujours jubilatoire. Compact et homogène, l'œuvre n'en demeure pas moins nuancée dans son intensité heavy. Hymnes immédiats, des enclumes démentielles telles que 'Stolen Dreams', 'The Old Man' ou 'Thousand Miles Away Frome Home' procurent ainsi des frissons par leur dureté duveteuse. Davantage que le digne successeur du galop d'essai éponyme, ce troisième effort démontre que Kadavar n'est pas juste la sensation du moment mais un grand groupe promis à durer. (2015)
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