17 avril 2016

Don Siegel | L'inspecteur Harry (1971)


En quelques mots : "L’inspecteur Harry" inaugure une série de cinq films produits entre 1971 et 1988, et qui vont faire de l’acteur une star, voire un mythe tout en lui collant une étiquette de dangereux réactionnaire dont il aura bien du mal à se débarrasser. Tourné avec toute la nervosité nécessaire et coutumière du réalisateur, "L’inspecteur Harry" se révèle être déjà un excellent polar pour le moins efficace, très rythmé (la musique de Lalo Schifrin n’y est sans doute pas pour rien) , au scénario parfaitement architecturé et riche en scènes d’action. Longtemps cantonné à la série B, Don Siegel appose sa griffe à ce film admirable de sobriété et de concision. Pas un plan superflu, aucun effet facile ne viennent parasiter la conduite du récit menée avec une urgence presque palpable. Siegel parvient à rendre avec beaucoup de réalisme le tissu urbain. Baignant dans une ambiance trouble et violente (la nuit semble peuplée de voyous en tout genre), la vision de San Francisco ici dépeinte s’avère très éloignée, volontairement d’ailleurs, de celle de Bullitt qui offrait en 1968 un éclairage plus pittoresque de la ville californienne. Mais au delà de ses incontestables qualités, c’est son personnage principal qui a fait la renommée du film. Harry Callahan est un flic désabusé, solitaire, individualiste et raciste. Recourant à des méthodes expéditives, il ne s’embarrasse pas de scrupules pour abattre les criminels de tout poil, se faisant le bras armé d’une justice par trop laxiste. Il est un chasseur pour qui seule la traque des meurtriers compte. Il n’a plus de vie sociale et une vie privée réduite au minimum. Le plus important pour lui est son métier. Dirty Harry apparaît comme un héros pour le moins ambigu, certes du bon côté de la loi, mais n’hésitant pas à recourir aux mêmes méthodes (le Magnum 44 le prouve) que les meurtriers qu’il traque. Parfois, la frontière entre le bien et le mal semble difficile à définir clairement, comme souvent chez Eastwood. Ainsi, lors de l’affrontement final, Callahan et Scorpio, chacun mu par des pulsions meurtrières confinant à l’obsession, ne sont finalement pas si éloignés l’un de l’autre. Ils constituent en quelque sorte les deux faces d’une même pièce. Seul Clint Eastwood pouvait interpréter un tel rôle, prêtant à celui-ci son regard froid et plissé, son hiératisme, son humour empreint de cynisme et son charisme. Suite aux critiques que le film, conçu comme une sorte de western urbain, a suscité, Clint Eastwood tentera de se défendre en en tournant une suite deux ans plus tard : Magnum Force.



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