Baroness
fait partie des rares formations contemporaines à avoir su imposer au fil du
temps une identité autant visuelle que sonore, laquelle doit forcément beaucoup
à John Baizley, à la fois fondateur, chanteur et graphiste dont les artworks,
superbes, se révèlent tellement reconnaissables qu'on associe de facto au
groupe de Savannah, les nombreuses pochettes que le bonhomme réalise par
ailleurs pour Torche, Black Tusk et bien d'autres. Baroness, c'est donc un
univers coloré au style très marqué, qui gravite quelque part entre Sludge émotionnel
et progressif trapu mais c'est aussi un concept, chaque album répondant au nom
d'une couleur. Après le rouge, le bleu, le jaune et le gris, les Américains ont
choisi le pourpre pour baptiser leur quatrième offrande qui a bien failli du
reste ne jamais voir le jour, suite au grave accident dont ses auteurs furent
les victimes en 2012 avec leur tour-bus. Ceux-ci ont-ils puisé dans cette
épreuve une volonté, une énergie qui commençaient à s'étioler, témoin ce
"Yellow & Green" (trop) contrasté et traînant en longueur ? Possible mais laissons de côté ce genre
d'analyse de bazar, facile et vaine. Toujours est-il que le quatuor livre avec
"Purple" l'opus que nous attendions tous après un "Blue
Record" référentiel. N'allez cependant pas croire que Baroness ait décidé
de renouer avec le son crasseux de ses balbutiements, au contraire, il reste
fidèle à la signature qui a fait son succès, d'une trompeuse simplicité,
capable de brasser un large public. Toutefois, il n'en demeure pas moins vrai que
sa musique se pare de cette nervosité acérée dont était un peu avare le disque
précédent. Il en découle un ensemble compact et ramassé, à l'intérieur duquel
se niche toujours cette singulière ambivalence que nourrissent ces aplats surpuissants
et cette voix fragile teintée d'amertume. Mélodique et tendu comme le foc d'un
navire, l'inaugural 'Morningstar' synthétise avec force et élégance cette
écriture nuancée. Relativement court, l'album est tout du long traversé par ces
tumultes qui l'empêchent de se noyer dans le sirop, piège parfois évité de peu,
il est vrai. Mais il y a toujours ces riffs féroces ou ces soli que ne
renierait pas Brian May de Queen qui sauvent des titres tels que 'Try To
Disappear', 'Chlorine & Wine' et
surtout 'If I Have To Wake Up (Would You Stop The Rain)', de la niaiserie,
soulignant par là-même l'importance du guitariste Peter Adams dans l'érection
de sonorités aux accents évolutifs. Extrêmement dynamique, "Purple"
ouvre les vannes d'une mélancolie qui poisse la majorité des morceaux, à
l'image de 'The Iron Bell' ou 'Kerosene', tavelé de discrètes effluves electro
cependant que des lignes tordus à la Mastodon se faufilent au milieu. Baroness
signe le grand disque qui devrait le réconcilier avec son public que "Yellow
& Green" avait quelque peu déçu. (2016)
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