Alors
que la chanteuse nous avait habitués à une inspiration prolifique, offrant un
nouvel opus tous les ans ou presque, il faut attendre trois années, cependant
remplies de produits divers (compilations, EP…) avant de pouvoir goûter le
successeur du controversé Machine II Machine (1995). Cette longue gestation
peut s’expliquer à la fois par la rupture du contrat qui la liait depuis 1985 à
Polygram et par la volonté de peaufiner ce sixième album solo. Forte d’une
alliance avec WEA, elle décide de poursuivre en partie la collaboration avec
Jürgen Engler et Chris Lietz de Die Krupps, tout en faisant appel au
compositeur Pop Jimmy Harry. Cette double association va déterminer la couleur
de Love Me In Black. Disque à deux visages tel un Janus du Heavy Metal, il
tente de plaquer à l'alternance entre titres pêchus et ballades qui a fait le
succès des premières offrandes de Doro, les atours plus modernes et quasi
électro développés par l’œuvre précédente. Comme on pouvait s’y attendre, le
résultat est fortement mitigé Le menu commence par deux morceaux aux guitares
très lourdes, "Do You Like It" et "Brutal And Effective",
auxquels succède la ballade éponyme aux contours hypnotiques. Puis déboule ce
"Pain" froid et trafiqué aux hormones indus. Après le dispensable
"Tausend Mal Gelebt", "Terrorision" enfonce le clou avec sa
rythmique martial. Presque parvenu à la moitié de Love Me In Black, un premier
bilan s’impose : sans être mauvais, aucun titre jusqu’à présent ne devrait
détrôner les hymnes d’autrefois. Car c’est justement ce qui fait cruellement
défaut à cette rondelle: l’absence de brûlots imparables, ceux que l’on a envie
d’écouter dans sa voiture ou de chanter en se tordant le cou dans un quelconque
festival allemand. Le reste du programme ne corrige pas cette faiblesse. Trop
de ballades sans saveur ni émotion ("Long Way Home", "Kiss Me
Good-bye"…), trop d’expérimentations (le néanmoins puissant "I Don’t
Care", "Poison Arrow") tellement loin de l’univers auquel Doro
est affiliée. Seule peut-être la reprise de Heart, "Barracuda" (tirée
de Little Queen) retient un peu l’attention mais sauve difficilement ce disque
de l'ennui. Jugeant l’album inadapté pour le continent nord-américain, WEA ne
le publiera qu’en Europe, décision sévère mais qui peut se comprendre, d’autant
plus que sa réussite artistique reste très contestable. A trop vouloir
expérimenter, Doro s’est franchement détournée de son giron maternel, ce qui
explique l’échec de Love Me In Black que l’on peut considérer comme son travail
le moins réussi. Que Force Majeure ou Doro paraissent loin ! Heureusement, deux
ans plus tard, Calling The Wild la verra (enfin) renouer avec son passé
(simplement) heavy. 2.5/5 (2010)
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