29 juin 2016

KröniK | Grlscz - Ak Spleen (2016)


Ceux qui espéraient trouver en Grlscz le frère jumeau d'un Grey November en sommeil depuis de (trop) longues années, en seront bien entendu pour leur frais. Car si les deux projets partagent une même âme mélancolique, celle de Cédric Seyssiecq, la comparaison s'arrête là. Et c'est sans doute très bien ainsi. L'absence de chant féminin (ou presque, celui-ci se résumant à la présence discrète de Marieke Delanghe le temps d'un titre),  fil d'Ariane fantomatique des oeuvres de son aîné, risque par conséquent d'en décevoir plus d'un. A sa place, la voix du seul maître des lieux, plus murmurée que chantée. Hésitantes voire maladroites par moment (Grosse tête et mèche soufflée), ses fragiles mélopées participent néanmoins d'une misérable contrition dont elles sont la triste plume.  Entité solitaire, Grlscz  se pare de fait d'une dimension extrêmement personnelle, recueil à la fois intime et cathartique où l'homme dévoile son coeur sans artifice. Si l'on reconnaît sa signature, décelable dans ce goût jamais renié pour les funèbres aplats, pour cette façon très particulière de progresser telle une silhouette spectrale avalée dans la brume qui nimbe d'antiques caveaux, et pour une écriture parfois extrêmement déliée aboutissant alors à des plaintes longues de plus de huit minutes (La solitude quantique des étoiles),  la voie qu'il a choisi de creuser dans ce jardin secret ne noue que très peu de liens avec le funeral doom ou l'art d'obédience gothique qu'il aime d'ordinaire à façonner. Quelques arrangements sinistres et une guitare squelettique soulignent à la manière d'un pastel mortifère une expression tout du long engourdie par une noirceur lugubre et crépusculaire. A l'image de cette surprenante reprise de Benjamin Biolay, Même si tu pars, Ak Spleen trempe son âme tourmentée dans les eaux d'une musique plus décharnée que rock, ensemble de plaintes égrenées avec une épure aussi noble que grave. Cela pourrait être ennuyeux mais suinte pourtant un mal-être douloureux, un désenchantement glacial. Et, passées les premières écoutes qui laissent une impression mitigée, le charme vénéneux finit, par petites touches pointillistes, par opérer, inoculant dans la mémoire ces mélodies qui envoûtent avant de vous entraîner dans les ténèbres d'une tombe aux dimensions abyssales (Je le savais). Ce faisant, peu à peu, on se surprend à être habité, hanté même, par ces râles funèbres, écrits à l'encre noire du désespoir. On retrouve alors le talent unique du musicien dont le sens de la mélancolie poétique demeure plus que jamais intacte. Et si Grlscz  ne remplacera pas Grey November, ce qui n'est pas son propos, les fidèles de ce dernier ne seront ni décontenancés ni déçus par cet essai. 3,5/5 (2016)

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