27 décembre 2019

Isole | Dystopia (2019)



















La rentrée est chargée pour les deux inséparables frères d'armes, Daniel Brynste et Crister Olsson qui, a un mois d'intervalle, complètent la discographie respective de Isole et de Ereb Altor, deux groupes dont ils partagent la paternité et qui leur permettent d'épancher leur soif de doom (pour le premier) et de black metal à tendance pagan (pour le second).

Ceux qui suivent depuis plus de quinze ans les travaux du tandem seront donc plus que comblés par cette double ration. Et ce d'autant plus que, eu égard à l'inoxydable inspiration des Suédois, toutes leurs offrandes se soldent par de franches réussites. Certaines plus que d'autres d'ailleurs. C'est le cas de "Dystopia" qui, inutile de tourner autour du pot plus longtemps, fera incontestablement date, et dans la carrière d'Isole et dans l'histoire du doom. Osons l'affirmer. Un seul (relatif) défaut semble grever tout d'abord ce septième opus, celui de démarrer trop fort au risque de faire oublier les six compostions qui suivent ce 'Beyond The Horizon' d'une rare puissance émotionnelle. Après une telle entame, bouleversante de beauté et de tristesse où les Scandinaves synthétisent en un peu plus de sept minutes tout ce qui fait la grandeur de leur doom d'une admirable pureté, on se demande comment le reste de l'album va pouvoir maintenir un tel niveau d'excellence et de sensibilité tant la barre est d'emblée placée très haut. 

De fait, les titres suivants peinent tout d'abord à imprimer dans la mémoire une empreinte aussi forte, au moins jusqu'au tragique et titanesque 'Galenskapens Land', pièce épique dont la langueur ténébreuse et glaciale la situe aux confluents d'Isole et d'Ereb Altor. Le chant de Daniel Brynste suffit à nous procurer des frissons de même que l'échappée finale où la guitare érige un mausolée de souffrance. Mais nous aurions tort de réduire "Dystopia" à ces deux seuls morceaux aussi grandioses soient-ils car les autres pistes n'en recèlent pas moins de véritables trésors. A commencer par 'Written In The Sand', marche sentencieuse qu'irriguent des guitares grésillantes et minées par un inexorable désespoir. Si 'The Beholder' honore la tradition du pur doom épique, 'You Went Away' n'hésite pas à forer les profondeurs d'une mine avec son tempo souterrain et ses saillies vocales caverneuses qui viennent également hachurer les dernières mesures de 'Forged By Fear'. Engourdi par une gravité solennelle, 'Nothingness' ferme le ban, longue procession prisonnière d'une gangue douloureuse que des voix d'outre-tombe poussent dans le puits sans fond d'un doom death tenace et granuleux. Cinq ans après "The Calm Hunter", Isole écrit une nouvelle page de son histoire avec ce "Dystopia" miraculeux, écrin de ce doom d'une lumineuse mélancolie qui n'appartient qu'à lui. Ce faisant, il signe une de ses plus belles réussites. (23.10.2019)
 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire