9 avril 2019

KröniK | Deathrite - Nightmares Reign (2018)


Cela fait longtemps que les Allemands ont largué les amarres du grindcore auquel leur premier rot éponyme les rattachait, pour accoster le rivage d'un death metal aussi puissant que sinistre, bien qu'il reste encore de diffus oripeaux de ce passé (pas si) lointain, à travers quelques furieuses et brutales accélérations dont ils ont le secret. Avec son artwork typique du genre réalisé par l'incontournable Mark Riddick (Revel In Flesh), "Revelations Of Chaos" (2015) a de fait nettement marqué un tournant pour Deathrite, le voyant rejoindre ces cohortes de zombies qui pataugent dans un baquet de viscères poissés d'un sang old school et doomy. L'hommage aux ancêtres suédois (Entombed, Grave, etc) et hollandais (Asphyx) est actuellement à la mode et c'est donc en toute logique que le géant Century Media a récupéré le combo et que celui-ci a décidé de serrer encore un peu plus le frein à main pour franchir le Rubicon du pur death metal.

"Nightmares Reign" mérite mieux que son titre quelconque, cénotaphe nocturne gonflé de macabres émanations. A l'exception d'un 'Bloodlust' dont la courte durée - moins de trois minutes - renvoie aux débuts du groupe, son menu repose sur des compos charpentées qui parfois n'hésitent pas à étirer leurs pesantes ramifications à l'image de l'imposant 'Demon Soul' dont le format dilaté ne freine pourtant pas une cadence fiévreuse qui se fracasse toutefois contre un blockhaus de béton armé. Les guitares aux allures de burin raclant les profondeurs de la terre jusqu'à l'os et surtout le chant grumeleux comme frotté avec du papier de verre à la Martin van Drunen (Pestilence, Asphyx) poussent ce quatrième album dans le caveau humide puant la charogne et la chair en décomposition. S'il leur arrive de galoper à la vitesse d'un Panzer en pleine invasion de la Pologne ('When Nightmares Reign'), imprégnant ainsi leur death d'un côté très rock, les Teutons aiment avant tout faire claquer leurs manches comme une peau tendue par des crochets de boucher. Le tempo s'abîme alors au fond d'un cratère duquel s'échappent cependant de pâles rais de beauté ('Appetite For Murder'). Lors du terminal 'Temptation Calls' qui voisine avec les dix minutes, Deathrite fait plus que graviter aux confins du doom. Sa longue échappée instrumentale que guident des guitares rivalisant d'émotions propulsent l'écoute vers de tels sommets qu'elle en efface presque tout ce qui l'a précédé. Déchirantes et désespérées, ces ultimes mesurent achèvent à la fois l'opus de la plus belle des manières et offrent à ses auteurs un nouveau visage, plus fin peut-être mais plus profond surtout. Ce faisant, ils enrichissent une identité qui jusque là était encore en jachère. Deathrite est devenu grand et "Nightmares Reign" brille de l'éclat morbide d'un death metal rampant et minéral, âpre et autoritaire. (17/11/2018) ⍖⍖⍖


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