9 avril 2018

KröniK | N.K.R.T - Sanctus Maclovius (2018)


Pour simplifier, on pourrait dire qu'il existe (au moins) deux Stéphane Gouby. D'un côté, il y a Nekurat, bassiste actuel ou passé des hordes noires Hyadningar, Sordide ou Mythrim, dans lequel il assure également les parties de chant et de guitares. Mais de l'autre, il y a surtout celui qui, sous le sobriquet de Frater Stéphane, est le maître de cérémonie de rituels incantatoires aux confins d'un drone chamanique et d'un dark ambient dévotionnel, d'abord avec Mhönos puis avec N.K.R.T, le premier dans une veine plus doom et liturgique, le second, plus expérimental et mystique encore.
Avec ce dernier, projet solitaire et abstrait, il repousse les limites en gommant l'espace et le temps. La frontière entre ses créations et ses performances n'existe pas vraiment en cela qu'il nous convie, quelque soit le cadre retenu, à une messe, noire forcément, où à l'aide de psalmodies lugubres et de percussions tribales, il capte les esprits de la nuit et d'une nature obscure. Avec "Sanctus Maclovius", tout entier imprégné de l'Aître Saint-Maclou dont il s'inspire, il accouche d'un rituel proche d'une transe hypnotique mais toujours aussi hermétique qui se vit plus qu'il ne s'écoute. A l'instar de ses prédécesseurs, il requiert obscurité et solitude afin de prendre toute sa (dé)mesure enveloppante. Austère et squelettique, l'oeuvre s'articule autour de trois psaumes.  Ethéré et monacal, 'Penitencia' peut être vu comme une sorte de préliminaire brumeux dont la voix résonne comme un écho funèbre. Faussement contemplatif, il invite à la contrition où peu à peu s'incrustent des râles inquiétants. A la plénitude de choeurs solennels répondent d'étranges bruitages qui viennent perturber le calme de cette retraite. Long de plus de vingt minutes, 'Vocem Ritus' voit Frater Stéphane convoquer les ténèbres en vomissant des formules aux sonorités oppressantes. La réverbération qui enrobe ces cantiques monotones leur confère une aura caverneuse, flottant dans une atmosphère croupissante de catacombes. L'impression d'assister à la résurgence d'un culte impie et oublié venu du fond des âges s'immisce dans l'esprit de celui qui l'écoute comme le témoin caché d'un rite séculaire qui progresse peu à peu, avalé par les miasmes telluriques d'un dark ambient mortifère. Plus désincarné encore se révèle être 'Corpus Ritus', lamentation grêle et frissonnante plus effrayante que nombre de blasphèmes black metal qui n'ont de noir que le nom. Chant possédé ou incantatoire, percussions osseuses, nappes fantomatiques et sifflements forestiers suffissent au maître des lieux pour nous plonger dans une nuit froide et éternelle, appelant de tout son corps, de toute son âme, des divinités lointaines et millénaires. "Sanctus Maclovius" est une expérience autant sonore que spirituelle qui vous hante longtemps après qu'elle se soit tue. 4/5 (07/04/2018)






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