Contrairement
à leurs voisins suédois, les Finlandais semblent moins portés sur le trip
nostalgique et lorsque c'est le cas, ils regardent dans le rétroviseur avec une
manière qui n'appartient qu'à eux, souvent plus progressive que rock'n'roll.
Sammal en constitue un bon exemple. Nourri - comme tant d'autres - aux grains
des seventies, le groupe façonne un art d'un anachronisme revendiqué qui
illustre la frontière ténue qui existe entre musique psychédélique et prog antédiluvien
teinté de Folk boisé. Très tôt remarqué grâce à un prometteur galop d'essai
éponyme dont les qualités ont ensuite été confirmées par un réjouissant EP, le
combo revient déjà nous enchanter avec une seconde rondelle du feu de dieu. Le
cadre est identique, porté par la voix magnétique du batteur Janu Kiviniemi
dont le chant en finnois confère à l'ensemble cette poésie aussi chaleureuse
que charmante. Ceux qui connaissent ses auteurs ne seront donc pas dépaysés par
"Myrskyvaroitus" qu'on aurait pourtant tort de considérer comme une
simple redite de son prédécesseur. Au contraire, il voit Sammal aller encore
plus loin dans le voyage dans le temps à un point tel qu'un auditeur égaré
pourrait croire être tombé sur une relique des années 70. Même patine sonore
chaude et généreuse, même feeling chatoyant. Il suffit d'écouter le son d'orgue
qui dégueule de partout entre les mains de Juhani Laine pour ressentir
l'impression en effet d'être revenu quarante-cinq en arrière. On ne saurait en
trouver meilleur illustration qu'avec l'instrumental 'Kohtaus Yön Vyöllä' dont
les nappes claviers paraissent s'être
échappées d'un album de Vanilla Fudge ou des premiers Purple. Nostalgique
peut-être, l'opus n'est pour autant pas recouvert d'une épaisse couche de
poussière, ce qu'il doit à une production superbe où chaque instrument respire,
notamment une basse toute en rondeur, témoin l'hypnotique 'Muurahaisen Päiväuni', lente pulsation orgasmique. Si le
chant ensorcelant et les claviers mènent la danse, la six-cordes n'est pas en
reste, comme le démontre un titre tel que 'Aika On Alkamassa' dont la dernière
partie est zébrée de soyeuses lignes de guitare. Oeuvre lumineuse qu'animent de
très belles compositions ('Stormvarning', 'Järjen Ohimarssi'...), "Myrskyvaroitus"
déroule un menu tout du long magnifique dont la seule (relative) faiblesse réside
peut-être dans son dernier titre certes émaillé de grands moments mais
néanmoins vierge de cette grandeur que son architecture étirée - plus de dix
minutes au compteur - semblait promettre. Ce qui n'empêche pas Sammal de
transformer l'essai avec une espèce de désinvolture qui est celle des grands. 3,5/5 (2015)
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