Jailli
du permafrost en 1990, Immortal connaît des débuts assez tortueux. Comme nombre
de musiciens ayant participé à cette époque à la seconde vague du black metal,
Abbath commence sa carrière sous le (mauvais) signe du death metal, avec Old
Funeral, qui verra passer en son sein
aussi bien le futur Burzum, Varg Vikernes que le fidèle Demonaz. Avec ce
dernier, il participe également à la fin des années 80 à Amputation qui n'a le
temps de régurgiter que deux démos avant de disparaître. Immortal naît de ses cendres.
Très vite remarqués grâce à deux courtes ébauches, les Norvégiens accouchent
d'un premier méfait en 1992, devenu culte, "Diabolical Fullmoon
Mysticism", dont le simple nom ne peut que raviver de précieux souvenirs
chez ceux qui ont vécu ce temps béni, celui du label français Osmose
Productions qui réalisait alors une véritable OPA sur le black metal, signant,
excusez du peu, Enslaved, Marduk ou Impaled Nazarene. Celui des désormais
mythiques Grieghallen Studios où tous les albums fondateurs du genre seront captés.
Celui où tout restait à faire, où voir des gargouilles, le visage grimé,
prenant la pause au milieu de ruines enneigées foutait (encore) la trouille. Si le groupe fera forcément bien
mieux par la suite et ce, dès le disque suivant, "Pure Holocaust", et
n'est pas encore le monstre (presque) surproduit qu'il deviendra dix ans plus
tard, il n'en demeure pas moins que cette offrande originelle possède une
ambiance très particulière, glaciale et sinistre vraiment unique, au point de
nous faire croire qu'elle est l'œuvre de créatures qui ne font qu'une avec la
nuit. Il est même permis de penser qu'elle incarne davantage le véritable black
metal, son essence et son âme, qu'un
"All Shall Fall" (2006), certes techniquement irréprochable
mais vidé de cette sève cryptique qui coulait dans les veines des Norvégiens
quatorze ans plus tôt. Secondé par le batteur Armagedda qui les quittera peu
après, Abbath et Demonaz gravent pour
cette première fois sept titres dont une intro. Bien que son identité ne soit
pas encore fixée, "Diabolical Fullmoon Mysticism" porte déjà en germe
certains caractères propres à Immortal, tels que ces textes crépusculaires
d'inspiration plus hivernale et mythologique que démoniaque, ou bien le choix
de conclure par une pièce au format épique et étiré. Du haut de ses neuf
minutes au jus, 'A Perfect Vision Of The Rising Northland' se veut d'ailleurs
la composition la plus longue jamais écrite par le groupe. Introduit par des
arpèges sombrement boisés, il est, avec 'Cryptic Winter Storms', lui aussi
pourvu d'une entame acoustique, la seule accalmie (relative) d'un menu qui,
pour le reste, fonce pied au plancher, de 'Call Of The Winter Moon' (qui fera
l'objet d'un clip aussi fameux que risible) au célèbre 'Unholy Forces Of Evil',
de 'Blacker Than Darkness' à 'Cold Winds Of Funeral Dust', quarteron d'une
fielleuse et obscure rapidité. Loin d'être une œuvre maladroite et mal
dégrossie, cet acte de naissance, auquel nombreux sont ceux qui préfèrent
cependant "Pure Holocaust", délivré un an plus tard, dévoile déjà de
vraies qualités autant en terme d'écriture occulte que d'ambiances lugubres. 3.5/5 (2015)
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