Six
ans après avoir enfanté le séminal The Path Into Revelation, ORIZEN nous rend
enfin une seconde visite, projet solitaire qui de fait se confond avec son
unique membre, Richard Leishman, multi-instrumentiste attaché à une certaine
vision de l'art noir, orthodoxe et mélodique, épique et mélancolique,
d'obédience (forcément) scandinave. Peut-être inconnu en dehors de sa cage
d'escalier, le bonhomme n'en force pas moins le respect pour le travail abattu,
lequel ne souffre à aucun moment de son caractère artisanal, fait à la maison.
Magie de la technologie qui permet de bricoler tout seul dans son coin une
musique qui pourtant n'est pas sans ampleur. Bien sûr, art de l'atmosphère, le
Black Metal se conjugue parfaitement à la première personne, ce qui n'enlève
rien aux qualités du jeune Suisse, bien au contraire. Loin du machin mal branlé et fruit d'un long
processus créatif s'étalant sur plusieurs années, Of Life, Death &
Salvation se révèle être un album imposant, tant par sa durée - plus de 70
minutes tout de même, fait assez rare dans le genre pour être souligné - que
par sa richesse de ton et de traits. Divisée en deux parties, l'oeuvre se
parcourt à la manière d'un récit dont on suit avec passion les épisodes
successifs. Corollaire de cette architecture, l'écoute ne peut être fragmentée,
devant être embrassée dans sa globalité froidement désenchantée. Moins sinistre
que Burzum, ORIZEN s'en rapproche néanmoins, partageant avec le Norvégien ce
même sens de la désolation, cette même beauté empreinte d'une tristesse
absolue, comme l'illustre l'interlude
Hypnotic Trip Through The Breath Of The Mind, épicentre instrumental de l'album
dont les premières mesures belles à pleurer, qu'égrènent un piano squelettique,
renouent avec la décrépitude qui hantait Varg Vikernes lorsqu'il était derrière
les barreaux de sa prison, gagnent toutefois par la suite en puissance,
cavalant à travers un vaste et désespéré paysage. Davantage que le chant, c'est
surtout la musique qui nous transporte
très loin. Les arrangements sont superbes, pinceaux servant à esquisser une
histoire minée par la solitude, les guitares tissent une toile dont chaque fil
est une note de regrets (Agony & Ecstasy) cependant que la trame épouse la
courbe sinueuse d'un chemin forestier, tout d'abord rapide, lors d'un premier
pan plus tranchant sinon accrocheur (Heaven & Hell), avant de tout miser
sur les ambiances durant une seconde partie que dominent les tempos lancinants,
meurtris. Tragique, l'album est une lente progression vers la mort qui
n'apparaît pourtant moins dans sa noirceur déprimante que dans sa dimension
salvatrice, laquelle confine à une forme de libération. Riche de ses nuances et
de sa progression inexorable, Of Life, Death & Salvation s'impose comme un
grand disque de Black Metal, à l'ancienne et douloureusement mélodique. (2015)
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