Entre un
nouveau gemme (Andromeda Awaiting) et cette collection de titres rares ou
demeurés inédits, c’est Noël avant l’heure pour les fans de Nucleus Torn. Travellers
se veut même le Graal attendu sans trop vraiment y croire puisqu’il agglomère,
excusez du peu, l’intégralité des enregistrements qui précédèrent Nihil soit
toute la genèse de ce néo-folk osseux si personnel. Le menu débute avec les
quatre pistes instrumentales du EP Krähenkönigin, gravé en 1998 et publié à
quelques exemplaires six ans après. Seul à la guitare sèche, Fredy Schynder y
libère des arpèges boisés dont le dépouillement confine à une forme de
mysticisme pastoral. Suivent les quatre morceaux composant Silver, première
trace discographique officielle remontant à 2001. Partiellement
ré-enregistrées, ce sont des créations déjà intéressantes bien qu’elles
tiennent davantage de l’esquisse que du travail achevé. Ils leur maquent
notamment ce chant féminin lumineux que l‘on aime tant. Parmi ceux là, le titre le plus beau reste le
long « Nucleurs Torn ». Démo capturée en 2002, Submission offre
ensuite ses deux extraits. On y découvre un groupe plus influencé par le rock
progressif (« Non-Light Submission »). Enfin cerise sur le gâteau,
Travellers s’achève sur deux pépites inédites et plutôt étonnantes, issues des
sessions d’enregistrement de Nihil. « Leadness », tout d’abord, est
zébré par les interventions d’un saxophone, ce qui lui confère une couleur presque
jazzy. « Lurking », quant à lui, ouvre les vannes d’une musique
intimiste rehaussée dans sa dernière partie par des notes d’orgue
mélancoliques. Ce recueil permet de suivre une identité en train de se
façonner, un style en mouvement. En cela, il est un témoignage précieux, il
donne les clés pour mieux comprendre le parcours emprunté par Nucleus Torn
avant d’aboutir à Nihil, opus grâce auquel une majorité l’a découvert, jusqu'à
Andromeda Awaiting.
Petit à
petit, à son rythme et sans faire de bruit, Nucleus Torn bâtit une œuvre
passionnante qui n’appartient qu’à lui. Tout d’abord arrimé à la clairière du
néofolk boisé grâce à un premier essai d’une beauté contemplative, le collectif
mené par Peter Schynder a ensuite déviée vers une musique plus atmosphérique
encore avec Knell. Andromeda Awaiting, au titre très poétique et dernier volet
d’une trilogie, choisit cette fois-ci une forme d’expression plus progressive
sans que celle-ci se démarque totalement du style élaboré par ses deux aînés.
L’art de Nucleus Torn évolue mais par petites touches impressionnistes.
Encadrée par deux sentinelles de plus d’un quart d’heure chacune, cette
troisième offrande déroule une trame épurée entre rock progressif antédiluvien
et musique folk et que nappent ces touches forestières typiques des Suisses.
Subdivisé en six segments, Andromeda Awaiting s’ouvre donc sur une piste
immense, voyage mystique qu’une vie
entière ne suffirait à décrire. Après une entame feutrée, le chant féminin vient
se poser, soulignant la beauté tragique dessinée par les divers instruments.
Puis le titre progresse nouant des liens avec le Lizard de King Crimson et la
longue pièce épique qui l’achève. Les lignes vocales masculines y font
notamment penser. A cette piste magnifique semble répondre celle qui entraîne
l’album vers la mort, lente déambulation aux accents symphoniques dépouillés et
que guide un piano et une flûte squelettiques. Entre ses deux monuments se
succèdent quatre morceaux plus courts, au caractère fortement instrumental
quand bien même la chanteuse glisse au milieu de ces motifs teintés d’ambiances
médiévales sa voix empreinte d’une tristesse diaphane. De part son
architecture, Andromeda Awaiting convient d’être absolument abordé dans sa
globalité. Il est un tout dont une écoute émiettée ne saurait rendre toute la
beauté mystérieuse en même temps qu'une forme d'aboutissement dans la carrière
de Nucleus Torn. (2010)
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