Malgré
son caractère encore inabouti, on se doutait bien que Quietly, Undramatically,
son second méfait - mais le premier en tant que véritable groupe et non plus
seulement le projet solitaire de Chris Grigg, ex Krieg, comme beaucoup d'autres
- n'avait en réalité qu'à peine défloré le potentiel de ces Américains. Trois
ans plus tard, Withdrawal fait donc plus que confirmer tout le bien qu'on
subodorait d'eux. Si Woe ne se départit pas de ce Black Metal furieusement
tranchant qui réussit la gageure de conférer à ces coups de boutoir rapides
comme un torrent en crue un aspect néanmoins rampant, implacable, en un mot,
mortifère. Là où l'opus précédent était bouillonnant, son successeur parait
plus maîtrisé, plus mélodique peut-être également, comme en attestent les
mesures acoustiques écartant les replis de "All Bridges Burned" et ce
solo qui le perfore en son milieu, bouffée d'air salvatrice au sein d'une
longue et saignante saillie. Les quelques bribes de chant clair qui le
parsèment ("This Is The End Of The Story") ne suffisent toutefois pas
à rendre Withdrawal moins rude que son aîné. 43 minutes durant, le groupe
maintient une intensité qui jamais ne s'essouffle, dresse un blockhaus
extrêmement dense. Résultat, on finit l'écoute sur les rotules, incapables de
lutter contre ce matraquage en règle que ne déserte pourtant pas une espèce de
beauté sourde, nichée dans les angles morts des compos les plus nuancées à l'image
de "Carried By Waves To Remorseless Shores Of The Truth", perforé par
de lourds aplats puis "Song Of My Undoing", dont le riff pollué qui
l'encadre a de faux-air de "Beholding The Daughters Of The Firmament"
de Burzum, mid-tempo reptilien qui écrase tout sur son sillage, sans oublier le
terminal titre éponyme que guident des lignes de guitare tour à tour
grésillantes avant de se parer d'un suaire d'émotions. Encore une fois, Woe
trouve le juste milieu entre âpreté viscérale et progression acérée. Tendu
comme le foc d'un navire, Withdrawal est une œuvre noire au goût de sang à même
de laisser de profonds stigmates dans la peau. Ce faisant, elle affirme la
domination du groupe au sein de la scène Black Metal US, moins culte que Krieg,
moins trendy que Nachtmystium, deux entités avec lesquelles ils nouent des
liens évidents, aussi bien humains que musicaux... 3.5/5 (2013)
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