Plus qu'un simple label, Zeitgeister est
avant toute chose une histoire de famille, celle de Christian Kolf (chant,
guitare, basse) et de Florian Toyka (batterie), dont tous les projets communs
(Valborg, Island) ou parallèles (Owl, Gruenewald pour le premier, Klabautamann
pour le second) y sont soigneusement abrités. Il ne manquait plus Woburn House, troisième côté du
triangle réunissant leur talent, et jusque là hébergé chez Paradigms Records.
C'est désormais chose faite, Sleep Summer Storm scellant cette naturelle
réunion. Pour ceux qui ne le connaîtraient pas, sachez que Woburn House forge
une musique des plus personnelles. Inclassable, celle-ci hésite entre Sludge,
progressif et Doom atmosphérique. Arc-bouté sur de longues et tortueuses
compositions, Message To Ourselves Outside The Dreaming Machine (2006) et
Monstrous Manœuvres in The Mushroom Maze (2009) furent deux œuvres extrêmement
difficiles à appréhender. C'est aussi ce qui faisait leur charme et leur
réussite. Plus ramassée, cette troisième offrande pourra dans un premier temps
décevoir les (rares) familiers de ce qui n'est plus aujourd'hui qu'un tandem.
Les dérives instrumentales se font plus timides, corollaires d'une architecture
(à priori) plus simple. Dominé par le chant voilé et les accords décharnés de
Christian Kolf, véritable colonne vertébrale autour de laquelle viennent se
greffer des aplats mélancoliques, contribuant plus que jamais à le rapprocher
des travaux de Valborg auquel on pense beaucoup à son écoute, Sleep Summer
Storm réclame en fait de patients préliminaires avant de pouvoir être défloré.
Peu à peu, son intimité se dévoile, passé des écoutes initiales où l'emporte
une (fausse) impression de manque de puissance. Plus riche qu'il n'y parait,
plus posé également que ses deux aînés, l'album repose sur des arrangements
certes dépouillés mais pourtant totalement habités sécrétatoires d'une profonde
et désespérée beauté. La déchirante plainte éponyme, égrenée par cette guitare
désenchantée, résume avec justesse les atours squelettiques de cet essai à la
tension rentrée dont les touches contemplatives cachent en réalité une énergie
larvée, qui parait par moment vouloir exploser ("A Simple Man") sans
jamais vraiment y aboutir. C'est bien de cette non puissance que Sleep Summer
Storm gagne sa dimension si singulière, guidé par des lignes aussi entêtantes
qu'hypnotiques. Malgré le soleil figurant sur son inhabituel artwork, aucune
lumière ne s'en dégage, œuvre triste et un peu austère dont le goût d'inachevé
est trompeur tant il regorge de subtilités et de richesses tapies derrières les
nombreux faux-semblants qu'elle affiche, ne conduisant au final jamais
l'auditeur là où il s'y attend... 3/5 (2011)
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