Une page
myspace sahélienne en guise de seule source d’informations, pas de
crédit : c’est un euphémisme que de souligner que Witcher ne facilite pas
l’accès à son art. A peine sait-on que le projet est né dans le permafrost
russe. C’est tout. Mais, débarrassé de renseignements parasites, il ne nous
reste finalement que la musique. C’est bien là l’essentiel. Arrimé à la
chapelle noire, Witcher se situe en fait quelque part entre la Dark Ambient
dramatique et la peinture de paysages drapés dans le manteau d’une neige
éternelle. Comme il se doit, A Lonely Journey to the Land of Oblivion déroule
une trame totalement instrumentale dont le principal acteur prend la forme de
claviers omniprésents, comme le réclame le (sous) genre. Seules des percussions
viennent épouser ces lignes synthétiques. Au programme, trois plages uniquement
oscillant entre 10 et 20 minutes au compteur. Chiant comme la messe pour la
majorité d’entre vous, Witcher réussit pourtant à faire jaillir une beauté
majestueuse de ce tricot de notes aussi minimalistes que monotones. Cet modeste
exploit, il le doit aux diverses tessitures qu’il fait prendre aux
synthétiseurs. Mieux que d’autres plus connus, le one-man band ( ?)
parvient à capturer l’essence contemplative teintée de tristesse d’une nature
figée dans la désolation. Encore une fois, la ligne séparant le magnifique du
ridicule est ténue. Witcher y déambule avec un sens de l’équilibre tout à son
honneur. « The Sacred Ocean, We Take Our … » est même une pièce
sombre et remarquable, qui étale un tapi ambient hypnotique qui n’est pas sans
évoquer certains travaux parmi les plus récents de Klaus Schulze. On peut regretter
que le Russe ne creuse pas davantage ce sillon qui lui sied à merveille, plutôt
que d’exploiter, comme il le fait sur les deux titres suivants, une forme
d’expression moins envoûtante bien que toujours très belle. De plus, sa musique
gagnerait sans doute aussi à être plus ramassées. Le dernier morceau du haut de
ses presque 20 minutes illustre bien cette relative faiblesse qui exonère
Witcher d’une partie de son potentiel introspectif et de sa puissance
d’évocation. Une belle offrande à tout le moins à recommander aux amateurs de Vinterriket
ou du Burzum carcéral. 3/5 (2010)
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