3 avril 2023

KröniK | Deathbell - A Nocturnal Crossing (2022)




Une fois n'est pas coutume, l'honorable Svart Records fait des infidélités à sa Finlande natale dans laquelle il a tamisé tant de perles sonores en publiant A Nocturnal Crossing, second voyage de Deathbell, formation française basée à Toulouse dont le silence depuis quatre ans n'était pas sans nous inquiéter. Galop d'essai plus que prometteur, With The Beyond serait-il condamné à demeurer sans héritiers ? Nous commencions malheureusement à le croire mais son tardif successeur vient enfin balayer nos craintes. Ce retour se réalise sous les meilleurs auspices. Un label exigeant et un artwork que signe Adam Burke, auteur d'une pléthore de pochettes (pour Hooded Menace, Evoken...) annoncent un changement de division pour le groupe dont la réputation devrait dès lors pouvoir s'extraire du simple cercle constitué de quelques doomeux.  Car, pour ceux qui ne le connaîtraient pas encore, sachez que Deathbell officie dans un registre plombé et doloriste que nimbe une voix féminine brumeuse. Du doom à chanteuse donc. "Un de plus !" s'écrieront certains quand d'autres seront ravis de butiner à nouveau une combinaison qui déçoit rarement, d'autant plus que les Français ne sont pas dénués d'une personnalité affirmée qui, sans gommer les invariants propres au genre, doit beaucoup à la solennité fantomatique des lignes vocales ainsi qu'au chatoiement victorien de claviers aux teintes liturgiques. 

Deux traits sur lesquels appuie pour notre plus grand bonheur A Nocturnal Crossing qui, comme son superbe visuel le déclare, se colore d'une dimension plus onirique encore. Si du heavy doom occulte des débuts, il demeure toujours quelques oripeaux, à l'image d'un 'Shifting Sands' évocateur de Blood Ceremony ou de The Devil's Blood, la musique forgée par le quintet se pare désormais d'atours plus atmosphériques sinon progressifs, ce dont témoigne par exemple l'énorme 'The Ladder', pesante cathédrale qui, du haut de ses presque neuf minutes, répand des effluves évolutifs mais toujours couturés par des riffs d'airain et ourlés d'une amertume souterraine. Au surplus, le groupe démontre une science de la composition extrêmement travaillée, accouchant de véritables joyaux d'écriture, d'ambiances et de progression.  Sombrement féérique, 'The Stronghold And The Archer' ensorcelle, tapissé par des synthés moelleux, 'Devoured On The Peak' a quelque chose d'un récit aventureux mais dramatique dont la voix fantomatique de Lauren est le guide sentencieux. Jamais l'opus ne s'échappe d'un clair-obscur embrumé et romantique ('Silent The Comes'), tout du long engourdi par une délicatesse immobile. Après quatre années de disette, Deathbell revient plus grand avec A Nocturnal Crossing qui inocule à la lourdeur du doom le velouté de sonorités progressives, œuvre rêveuse quoique toujours frappée du sceau d'une triste noirceur. (15.05.2022 | MW) ⍖⍖⍖

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