Si l'admiration que nous ressentons pour lui ne s'est jamais démentie, le fait est que Sula Bassana nous a un peu laissé sur le bord de la route ces dernières années, que ce soit en solo ou dans un des groupes qui l'occupent. Depuis Shipwrecked (sous son nom), Love Monster (Zone Six) et Stardust Rituals (Electric Moon), respectivement gravés entre 2016 et 2017, aucun album portant sa signature n'a vraiment su laisser de durables sédiments dans la mémoire, impression de déjà-entendu (Kozmik Moon) et expérimentations électroniques moins inspirées (Organ Accumulator). Pourtant et contre toute attente, l'année 2022 restera comme un excellent cru pour Dave Schmidt puisque International Space Station Volume 1, le split entre Electric Moon, Kungens Mäns, ElonMusk et Kanaan et ce Nostalgia nous rappellent à notre bon souvenir ce qu'il sait faire de mieux, à savoir ce space rock solaire et généreux mâtiné de psychédélisme ouaté. En ce sens, cette nouvelle échappée en solitaire porte parfaitement son nom puisqu'elle voit son créateur renouer avec le krautrock qu'il tricotait à l'époque bénie des Dreamer (2002) ou autre The Night (2009). Ce qui s'explique par le fait que ces cinq pistes ont en réalité été composées il y a quelques années déjà, entre 2013 et 2018.
Cette écriture morcelée, étendue dans le temps, commande en outre le caractère hétérogène d'un menu qui se pare ainsi de multiples couleurs. On devine que Sula Bassana a tenté, plutôt adroitement d'ailleurs, d'assembler ces pièces éparses pour en faire un tout cohérent, rendu possible par ce substrat commun nourri à ce psychédélisme rêveur. A ce sujet, à l'image de son superbe visuel, du au peintre français Hervé Scott Flament, Nostalagia baigne dans un climat onirique. Embrumé par la voix lointaine du maître des lieux, 'Real Life' voyage tranquillement aux confins de l'Orient, aventure nébuleuse que poursuit un 'We Will Make It' plus hypnotique et stellaire. Epicentre de l'écoute, le morceau-titre trempe dans les effluves d'un Mellotron moelleux qui lui confère sa patine nostalgique, imbibé comme ses devanciers de rock psyché sixties. Instrumentale, la dernière partie de l'album décolle très haut, irriguée par la sève cosmique typiquement allemande entre un 'Wurmloch' tripant au sein duquel bataillent oscillations spatiales et guitare gorgée d'effets cotonneux, et ce 'Mellotraum' à la fois crépusculaire et contemplatif. Au final, Nostalgia ne souffre pas de sa genèse éclatée, opus tout entier guidé par ses ambiances songeuses et tendrement nostalgiques et s'impose comme un des albums les plus jubilatoires de Sula Bassana. (le 3 novembre 2022) ⍖⍖⍖
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