L'humus noir national regorge de petites formations dont l'intérêt est inversement proportionnel à une exposition pour le moins limitée, si tant est que l'accès à la lumière soit réellement pour celles-ci le but à atteindre. Anakreb, puisque c'est de lui dont il s'agit, rejoint ainsi ce bataillon grouillant dans les fonts baptismaux. Son premier rot pue l'underground et le fait-maison : digipack squelettique, prise de son décharnée, artwork à l'avenant et musicien solitaire qui assure tous les instruments. Mais il existe toujours le charme de ces modestes productions qui maintiennent en vie un état d'esprit, des valeurs, ceux du black metal authentique, evil et nocturne, sinistre et pollué mais dans l'intimité duquel bouillonnent toutefois des mélodies. D'une âpreté vicieuse à tout le moins. Cachant son visage, Vikko Forest incarne l'âme de ce projet obscur que ces quatre saillies déflorent avec un sens réel de la morsure souillée et des atmosphères froidement désespérées. Quatre pistes donc pour une durée qui franchit néanmoins la barre des trente minutes au jus car notre misanthrope ne craint pas de prendre son temps, de promener la lame de son scalpel sur la peau qu'il tranche parfois avec une lancinance morbide.
Ce qui lui dicte ces 'Balafres de l'âme' et plus encore la 'Purge' terminale au format dilaté, reptation aussi implacable qu'obsédante pour le premier, derelict englué dans un mal-être inexorable pour le second qui voisine quand même avec le quart d'heure d'émanations rouillées, de marée noire léchant toute trace de vie sinon d'espoir charriée par ces riffs maladifs aux allures de burin ferrugineux taillant des instants mortifères comme suspendus au-dessus d'un puits sans fond. Le Brestois s'y entend pour décharger des rails de guitares aussi entêtants que venimeux, qui s'abîment dans les replis ténébreux d'une chair meurtrie mais irriguent aussi avec une vélocité nocive deux premiers titres plus torrentueux. Plus sales également. "Satyre' puis 'Errance morbide' ont quelque chose d'écorchés dont on écarte la peau pour entrevoir la panse infâme d'un art noir aussi haineux qu'abrasif que le maître des lieux crève avec son chant hurlé comme possédé, cris de bêtes égorgées par un froid matin dans les entrailles d'une lugubre forêt. Hostie séminale qui laisse dans la bouche un goût de semence sanglante d'une malveillante froideur, Anakreb trace un black metal d'une sévérité orthodoxe que rongent autant une lèpre négative que des mélodies sournoises tapies dans les ombres de cette âme solitaire qui, à sa mesure modeste, honore une expression macabre et ancestrale, dépouillée et incisive. (02.05.2022 | LHN) ⍖⍖
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