18 janvier 2023

KröniK | Abbath - Dread Reaver (2022)




Evidemment, on ne présente plus Abbath, figure tutélaire du black metal norvégien. En 2015, son départ houleux d'Immortal dont il était pourtant indissociable, en a étonné plus d'un. Contrairement à son ancien port d'attache qui n'a pas vraiment brillé par une intense activité depuis cette scission, n'enfantant qu'un seul méfait en 2018 (Northern Chaos Gods), le chanteur et guitariste n'a pas chômé puisque Dread Reaver est déjà son troisième effort sous la bannière qui porte son nom. Si Abbath, le groupe, ne remplacera jamais le "vrai" Immortal, force est de reconnaître la solide tenue de l'album éponyme et de Outrider. Connaissant le talent du bonhomme, associé à une exigence jamais démentie, il aurait de toute façon été surprenant que cette aventure hors du giron maternel se solde par une déception. Epaulé par des musiciens qui lui sont forcément tous acquis, le Norvégien est le seul patron à bord, pouvant à sa guise sculpter cet art noir dont il a le secret, épique et heavy, glacial et tranchant. Au risque de ne plus surprendre. Fort d'une signature dont il ne se départira donc jamais, le désormais vétéran accouche ainsi d'un nouvel opus qui porte dans sa chair son indélébile morsure. De cette voix rugueuse biberonnée au Destop jusqu'à ces riffs tourbillonnants creusés dans le Permafrost, Dread Reaver est du Abbath pur jus, dont l'empreinte demeure reconnaissable entre mille. 

Nul ne se plaindra réellement de ce moule éprouvé d'autant plus qu'il est à l'origine de saillies d'une redoutable efficacité ('Acid Haze') voire parfois franchement brutales à l'image de 'The Deep Unbound'. Mais comme au temps béni d'Immortal, ce sont vers les compos pétrifiées d'atmosphères gelées que tend notre préférence. Citons le gigantesque 'Myrmidon' ou le massif 'Septentrion' dont les froides et sombres crevasses n'en bouillonnent pas moins dans leurs entrailles d'une dureté bestiale. Dans sa dernière partie, 'The Book Of Breath' est traversé par un blizzard envoûtant qu'égrènent ces arpèges typiques du maître des lieux tandis que le mid-tempo 'Dream Cull' gravite le long de fjords majestueux érodés par les coups de boutoir de guitares plus heavy que black metal. La reprise du 'Trapped Under Ice' de Metallica et cette haleine râpeuse digne de Lemmy Kilmister font quant à elles affleurer les racines eighties, speed et thrash, chères au Scandinave. Equilibre parfait entre puissance torrentielle et ambiance glaciale, Dread Reaver ne surprend pas mais ne déçoit pas non plus, propulsé par un Abbath très en forme qui honore ce black metal abrupt et mélodique selon son cœur sans pourtant parvenir à nous faire oublier ni Immortal dont le schisme demeure quand même un beau gâchis, ni même Between Two Worlds, l'unique album de I, son éphémère projet avec la crème de la chapelle noire norvégienne. (27.03.2022 | MW) ⍖⍖

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