Les voyages de Gulliver a de nombreuses fois été adaptés au cinéma, trouvant dans le roman de Jonathan Swift matière à émerveiller, aidé en cela par d'effets spéciaux du moment. La version de 1960 doit ainsi tout à Ray Harryhausen qui, deux ans plus tôt, a fixé son style avec Le septième voyage de Sinbad (1958) de Nathan Juran, tant d'un point de vue technique que visuel. bestiaire légendaire en stop-motion et couleurs flamboyantes incarnent cette signature reconnaissable entre mille. Mais le film de Jack Sher (auteur du bien plus enthousiasmant Bagarreur solitaire avec Audie Murphy) ne possède pas les mêmes qualités que son devancier, loin s'en faut. La faute incombe à une adaptation qui expurge son matériau de sa dimension philosophique en effaçant deux des quatre voyages. Purement décorative, la mise en scène ne déborde ni de fougue ni de folie, tandis que Kerwin Mathews, recyclé du Sinbad, manque toujours quant à lui de charisme sinon de présence.
Après une première partie amusante chez les Lilliputiens, le voyage chez les géants finit en revanche par ennuyer. Reste de chatoyantes images inspirées des fééries orientales d'Alexandre Korda et, bien sûr, les prouesses imaginatives du maître Harryhausen qui redouble d'inventivité et exécute des séquences mémorables, entrées dans l'imaginaire collectif des cinéphiles, à l'image de ces combats entre Gulliver et diverses bestioles géantes, atours qui destinent avant tout ce film à un public juvénile. Le spectacle se veut aussi charmant que inoffensif et la grande adaptation du roman de Swift reste toujours à faire par un 7ème art qui, ivre des techniques dont il dispose, possède la fâcheuse et regrettable manie d'oublier la profondeur satirique de cette critique de la vanité des hommes et du pouvoir au profit de la seule aventure... (vu le 03.12.2021) ⍖
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