29 décembre 2022

KröniK | Graves For Gods - The Oldest Gods (2022)




Quand vient l'heure de déflorer le premier album d'un groupe inconnu, nous ne savons donc jamais trop ce que nous allons butiner dedans. Les références manquent, les repères habituels aussi. Tel est ainsi le cas de The Oldest Gods, offrande séminale de Graves For Gods, trio australien dont le pedigree des membres ne nous évoquent rien non plus. Mais le fait que le très respectable label français Sleeping Church, qui a le doom chevillé au corps et fidèle à une exigence qui ne s'est jamais démentie, publie cet album nous rassure d'emblée tant sur son quota de plomb que sur sa qualité. Dont acte. Ce qui frappe tout d'abord et comble de plaisir une fois la rondelle avalée par la fente de la platine CD qui en crache les premières notes, c'est l'expression old school que Graves For Gods a choisi de respecter. A l'écoute de ce galop d'essai, l'impression d'avoir déniché une obscure relique qu'une analyse au carbone 14 daterait des années 90 envahit alors l'esprit du vieux doomeux qu'est désormais votre serviteur. Chant bien caverneux, tempo engourdi par un désespoir séculaire comme venu du fond des âges, batteur qui a le temps d'aller pisser entre deux coups de caisse claire, le tout enfermé dans des compositions qui se traînent à l'infini et enrobées d'un fuselage sonore rudimentaire, renvoient à un doom death éternel gravé dans un caveau funèbre. 

Du haut de ses quatre plaintes pour quarante minutes de sonorités pesamment doloristes, The Oldest Gods pourrait être miné par un monolithisme absolu, ce que le groupe évite en aérant son propos, en fissurant le bloc qu'il sculpte au burin par de fébriles et fugaces échappées néanmoins salvatrices. Celles-ci épousent les traits d'une guitare qui sait briser le corset qui la plombe en tissant une toile fragile et belle à pleurer au détour d'un 'Firetop Mountain' minéral ou d'un 'Embalmed Embrace' dont la noirceur charbonneuse se dilue elle aussi dans la tendresse lumineuse de cette six-cordes pointilliste conjuguée à des bribes de chant clair. Mais cette délicatesse mélodique est toutefois avortée par la force d'attraction tellurique à laquelle ces processions ne peuvent résister, témoins 'The Oldest Gods' et plus encore le terminal 'Wake', véritable descente dans une mine funéraire. Une thématique enracinée dans une culture ancestrale et mythologique achève de faire de Graves Of Gods une formation à l'identité aussi affirmée qu'attachante, auteur d'un premier jet riche d'une ambivalence singulière, dramatique et encroutée dans sa lenteur funèbre mais atmosphérique par les tranchées mélodiques qui l'irriguent. (13.03.2022 | LHN) ⍖⍖⍖

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