4 novembre 2022

KröniK | Philippe Blache - The Ever Sounding Sea Of Grief (2022)




The Ever Sounding Sea Of Grief n'est pas publié sous la bannière éthérée de Day Before Us mais sous le nom de celui qui en est l'âme, Philippe Blache. De prime abord, ce choix peut sembler surprenant venant d'un artiste qui jouit d'une liberté totale au sein de l'entité qu'il incarne depuis une dizaine d'années et dont on peut se demander quel intérêt  a-t-il de s'en échapper le temps de cette nouvelle offrande qui, au surplus, ne déserte pas (totalement) les rivages ambient et cinématiques coutumiers de ce musicien passionné et passionnant. Ainsi, l'empreinte de Philippe Blache demeure parfaitement identifiable pour qui est familier d'une œuvre aussi rare que précieuse. The Ever Sounding Sea Of Grief est tapissé par ces fresques sonores immersives auxquelles Day Before Us nous a habitué tandis que la narration (parcimonieuse) susurrée par Olga Gabris est découpée dans le même linceul féminin drapant Ode à la nuit d'ombre ou Prélude à l'âme d'élégie notamment. Enfin, la photographie aux teintes glaciales de Natalie Ina, qui signait déjà celle servant d'écrin à As My Spirit Wanders Free, achève de connecter cet essai à l'univers de son auteur. Le fidèle ne sera ni déçu ni (tout à fait) décontenancé par cette évasion solitaire. Pour autant, il est parait évident que The Ever Sounding Sea Of Grief n'aurait pas pu porter le nom de Day Before Us dont il s'éloigne discrètement tant dans le fond que dans la forme. Cathartique et nourri des doutes et tourments qui  tenaillent Philippe Blache, le fond se révèle extrêmement personnel. 

D'où le fait que l'opus se confonde avec son créateur, lequel a puisé dans les profondeurs de son être, de son cœur et de son âme pour en extraire ce matériau d'une sourde et ténébreuse puissance d'évocation, brodant des textes d'un funèbre romantisme. Cette dimension purgative commande une forme plus crépusculaire que jamais et dont l'inexorable mélancolie trempe dans un buvard désespéré. Aux tapisseries néo-classiques de Day Before Us le musicien privilégie cette fois-ci une tessiture plus dark ambient quoique toujours aussi fantomatique ('When Breathless Midnight Beats To The Same Litanie Of My Heart'). L'homme prend son temps pour étirer des complaintes presque immobiles, hantées par un souffle gelé à l'instar du bien nommé 'Among The Ruins Of A Shrine', évocateur de paysages abandonnés. Délaissés. Vidés de toute trace de vie. D'une force contemplative qui semble provenir des arcanes les plus sombres de l'intime, ces pièces taillées dans une souffrance intérieure invitent au recueillement, à la pénitence, à l'immersion désolée. Retable d'une grande force dramatique, l'opus questionne le rapport que son auteur entretient avec la spiritualité, religiosité qui traverse toute son œuvre et qui trouve dans l'immense 'Grey Empurpling Heavens' et sa liturgie sentencieuse, son expression la plus pure. La plus douloureuse également. Difficile de ne pas être ému, transporté par cet album aux atmosphères glaciales et enveloppante qui s'inscrit parfaitement dans l'œuvre de Philippe Blache, lequel continue inlassablement de travailler son art avec un mélange d'inspiration et d'humilité qui n'a d'égale que la force d'une écriture qui touche au sacré. (le 4 novembre 2022) ⍖⍖⍖⍖

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire