11 septembre 2022

KröniK | Manuel Göttsching - Live At Mt. Fuji (2007)




Bien que moins connu du grand public que son ami Klaus Schulze (si tant est que celui-ci le soit réellement), Manuel Göttsching n’en demeure pas moins lui aussi une des figures tutélaires du rock d’avant-garde allemand des années 70. Sa carrière se confond avec celle d’Ash Ra Tempel (et d’Ashra), groupe qu’il forma à l’aune des seventies avec le génial claviériste. Les deux hommes partagent d’ailleurs beaucoup plus que cette formation en commun. Tous les deux ont bénéficié de l’enseignement précieux du compositeur Thomas Kessler, ont joué dans les Cosmic Jokers, se sont croisés un grand nombre de fois en solo (sur le fameux In Blue en 1995 notamment) et sont épris d’expérimentations. Surtout, ils sont su chacun dépasser, transcender l’utilisation jusqu’alors faite d’un instrument, le synthétiseur pour Klaus Schulze, la guitare pour Manuel Göttsching, quand bien même celui-ci s’avère aussi être un excellent claviériste. Tout l’art de ce dernier réside justement dans cette combinaison entre synthés et six-cordes. Capturé durant un festival au Japon en 2006, Live At Mt. Fuji témoigne bien du caractère bicéphale de sa musique. 

Avec bonheur, le berlinois revisite en cinq mouvements (pour plus de 70 minutes d’écoute quand même !) quelques temps fort de sa carrière : le matriciel New Age Of Earth (1976) avec le planant « Sunrain », Blackouts (1977) honoré par le dynamique « Shuttlerock », aux teintes presque techno, Die Mulde (2005) avec le titre éponyme ou le très beau Concert For Murnau (2005) représenté par « Saint & Sinner ». Les fans de la première heure seront donc aux anges. Seul sur scène, MG étire un tapis de mélodies électroniques, qui forment le socle de ses compositions sur lesquelles viennent se greffer des envolées d’une guitare stratosphérique (« Die Mulde », « Shuttlecock »). Calme, posée, reposante, pure, limpide, sa musique confine à la sérénité, à une forme de paix intérieure. L’homme prend son temps pour installer un climat presque contemplatif, joue sur la répétition d’un même son qu’il multiplie jusqu’à créer un effet hypnotique et obsédant. Et quand sa guitare aérienne et virtuose sans être démonstrative (le branleur de manche Yngwie Malmsteen peut donc aller se rhabiller), s’élève tout la haut, c’est l’infini qui s’ouvre à nous. On comprend pourquoi Manuel Göttsching, à l’instar de Klaus Schulze, est considéré par beaucoup comme l’un des pères spirituels de la musique techno et trance, position qu’il doit énormément, il est vrai, à son cultissime opus E2-E4 (1984) qu’une seule et unique piste de près d’une heure compose et dont on aurait bien aimé entendre sur ce live exceptionnel ne serait-ce qu’un (forcément) court extrait. Une magnifique porte d’entrée, pour ceux qui ne le connaissent pas encore, à l’univers de ce pionnier de la musique électronique. (29 juin 2008) ⍖⍖⍖

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