27 septembre 2022

CinéZone | Philip D'Antoni - Police puissance 7 (1973)




Votre serviteur se souvient avoir vu pour la première - et unique - fois Police Puissance 7 sur FR3 à 20h30 ! C'était il y a trente-cinq ans environ, époque où les quelques chaînes suffisaient à se bâtir un solide vernis cinématographique alors qu'on n'imagine pas aujourd'hui une chaîne du service public (ou pas) diffuser un polar américain des années 70 avec Roy Scheider pour seule vedette et mis en boîte par l'obscur Philip D'Antoni ! Ce nom là ne vous dira sans doute rien. Pourtant, le visionnage de The Seven-Ups s'accompagne d'un air de déjà-vu quelque part (ce n'est pas grave) dont est responsable sa démentielle poursuite en voitures dont l'une est pilotée par le cascadeur Bill Hickman, comme dans Bullitt et French Connection, deux polars matriciels produits par... Philip d'Antoni lequel, avec ce triptyque policier a alors établi les nouveaux canons du polar tant dans la forme (l'utilisation de la bagnole comme un cheval mécanique, cadre urbain d'une froideur automnale) que dans le fond (portrait de flics aux méthodes discutables). Fort du triomphe des mètre-étalon assurés par Peter Yates puis William Friedkin, la Fox confie la réalisation de Police Puissance 7 au producteur dont il s'agira de la seule expérience à ce poste et son testament. 

Sa proximité avec French Connection dont il est une sorte de faux frère-jumeau est évidente. Les deux partagent le même décor glacial fourni par la ville de New York et un sujet imaginé par Sonny Grosso que Roy Scheider incarnait dans la bobine de 1971. Il campe cette fois-ci le rôle de Buddy Manucci, membre d'une unité spéciale de la police new-yorkaise qui a réellement existé, d'où le titre original : The Seven-Ups. Ne proposant que peu de scènes d'action, le film peut décevoir mais il ouvre pourtant les vannes d'une tension paroxysmique à compter de l'exécution du personnage joué par Ken Kercheval. La pantagruélique poursuite en voitures qui en découle puis l'affrontement final où Scheider traque le long de voies ferrées sinistres un Richard Lynch fiévreux et habité cisaillent de leur énergie nerveuse un scénario dont la lenteur mélancolique ne rend ces morceaux de bravoure que plus claquants encore. S'il accouche d'un travail moins brillant sinon personnel que Peter Yates ou William Friedkin, D'Antoni ne démérite pourtant pas, faisant preuve au contraire d'un indéniable sens du rythme qui ne peut que nous faire regretter qu'il n'ait pas persévéré derrière la caméra. Il sait aussi teinter son film d'une forme de tristesse, de désespoir que soulignent autant la musique parfois inquiétante de Don Ellis (French Connection, encore), laquelle n'est pas sans évoquer les partitions de Bernard Hermann, et le jeu plus subtil qu'il n'y parait, de Roy Scheider, acteur très sous-estimé qui exprime d'un simple regard toute l'ambiguïté de son personnage. Celui-ci se rattache à ces flics qui envahissent les écrans à partir de la fin des années 60, héros troubles au comportement contestable car poreux avec le Milieu et usant de violence pour obtenir des aveux. Police Puissance 7 est un grand polar méconnu victime de son incompréhensible échec commercial, qui n'a pas à rougir de la comparaison avec Bullitt et French Connection qu'il complète admirablement, justifiant en cela son indispensable réhabilitation. (vu le 10.10.2021) ⍖⍖⍖



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