3 août 2022

KröniK | Alcatrazz - V (2021)




Après avoir participé à Rainbow puis à MSG, avec lesquels il grave successivement les référentiels Down To Earth en 1979 (avec le premier) et Assault Attack en 1982 (avec le second), Graham Bonnet monte Alcatrazz, formation restée célèbre pour avoir révélée deux des guitar-heroes les plus influents des années 80, Yngwie Malmsteen (sur No Parole From Rock'n' Roll) et Steve Vai (sur Disturbing The Peace). Mais la suite est moins fameuse pour ce groupe qui disparait très vite ensuite, pour se reformer entre 2007 et 2014 sans rien enregistrer de nouveau. Pourtant, trois ans plus tard, Graham Bonnet relance encore une fois Alcatrazz. Le bassiste Gary Shea et le claviériste Jimmy Waldo rempilent à ses côtés tandis que le poste de guitariste échoit à Joe Stump, qui a la lourde tâche d'épauler un chanteur marqué par ses collaborations avec des légendes de la six-cordes. Fruit de cette résurrection, Born Innocent (2020) est une bonne surprise. Mais alors qu'il en est le fondateur et surtout la voix, Bonnet est viré quelques mois plus tard, remplacé par le mercenaire Doogie White qui, depuis vingt-cinq ans s'est frotté (entre autres) aux mêmes guitaristes que son prédécesseur, de Blackmore à Malmsteen en passant par Schenker. Grand chanteur au demeurant et choix plutôt naturel pour tenir le micro, son recrutement n'en trahit pas moins Alcatrazz qui ne peut réellement exister sans son frontman historique et surtout pas dans les conditions douteuses de ce départ forcé. 


Rapidement, un cinquième album scelle ce nouveau line-up qui n'appelle pas à la bienveillance. Son titre peu imaginatif n'augure d'ailleurs pas d'une franche réussite, ce que confirme une prise de son d'un autre âge néanmoins plus convaincante que celle du dernier Malmsteen en date (Parabellum) et véritable insulte aux oreilles. L'ombre grassouillette du Bibendum suédois plane d'ailleurs beaucoup (trop) sur ce V que ses géniteurs auraient été bien inspirés de publier sous un autre nom que celui d'Alcatrazz tant le fond n'a plus grand chose à voir avec le style originel du groupe. Moins hard et plus speed que ses devancières, cette livraison braconne ainsi sans grande imagination sur les terres véloces et mélodiques elles aussi d'un autre temps. 'Gardian Angel' ressemble à du Yngwie, 'Nightwatch' à n'importe quel groupe de heavy qui bétonne un tempo soutenu. Et il en va de même du sirupeux 'Turn Of The Wheel' ou d'un 'Grace Of God' inodore. Quand le quintet serre le frein à main, il confond lourdeur épique et paresse graisseuse, signant des titres pesants comme un cassoulet ('Maybe Tomorrow', 'Return To Nevermore'). Un menu qui traine en longueur sur plus de soixante minutes achève d'en faire un album à moitié raté. A moitié, car l'ensemble s'enfile toutefois sans déplaisir grâce au savoir-faire éprouvé d'une équipe qui connaît toutes les ficelles du genre, fussent-elles épaisses comme des câbles à haute tension. V est donc à prendre ce qu'il est, une honnête rondelle de speed mélodique et non pas comme un pur album d'Alcatrazz dont l'âme s'est évaporée avec le limogeage de Graham Bonnet... (27.11.2021 | MW) ⍖

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