12 juillet 2022

CinéZone | Robert Hossein - Les yeux cernés (1964)




Réputé pour le gigantisme mégalomane de ses pièces de théâtres et plus encore de ses spectacles, Robert Hossein a pourtant démarré sa carrière de réalisateur par de petits films au format minimaliste et au traitement assez singulier. Après des débuts sous le patronage de Frédéric Dard (Les salauds vont en enfer, Toi le venin), il butine les principaux genres du cinéma populaire, espionnage, western avec une appétence pour le polar mais avec toujours une approche très personnelle, vaguement auteurisante et finalement peut-être plus proche de Franju ou plus tard de Jean Rollin que de la nouvelle vague à laquelle il serait tentant de l'accrocher. En se frayant un chemin dans la série noire, il occupe alors une place curieuse entre la tradition des années 50 et l'esthétisme, parfois poétique, souvent abstrait des années 60, positionnement évident exprimé par La mort d'un tueur et, quoiqu'en mode plus mineur, par Les yeux cernés qu'il tourne tous les deux en 1964. 

Qu'il associe dans ce dernier, Marie-France Pisier, sa muse de l'époque et vestale emblématique de la nouvelle vague, à Michèle Morgan, grande dame du cinéma français depuis les années 30, participe de cette passerelle entre ancien et moderne. Quelques décors plantés dans les Vosges, une poignée de comédiens et une intrigue policière qui semble n'intéresser personne ni Hossein ni les comédiens, commandent un film à l'atmosphère étrange que souligne une musique jazzy. Mais dégorgée de suspense sinon de tension, l'œuvre ennuie et on finit nous aussi par se désintéresser de cette histoire de veuve menacée par un corbeau. Qui est l'assassin de son mari ? Qui est l'auteur de ces mystérieuses lettres anonymes ? Peut-être la même personne ? On s'en moque, en dépit des efforts du scénario pour brouiller les pistes. Et en définitive, à force de vouloir dépoussiérer la série noire en misant sur une forme d'abstraction et un ton plutôt personnel, Robert Hossein filme le vide et échoue. Dommage pour Michèle Morgan, délicieusement absente, et Marie-France Pisier qui injecte un peu de sa folie espiègle à ce morne et sinistre polar. Malgré quelques plans et cadrages ingénieux, Les yeux cernés déçoit après La mort d'un tueur autrement abouti. (vu le 29.08.2021) ⍖⍖




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