20 juillet 2022

KröniK | Lucifer - IV (2021)




La pandémie l'ayant cloué au sol comme tous les autres groupes, Lucifer n'a pas eu grand-chose à faire d'autre depuis la mise-bas de son troisième rejeton que d'en élaborer très vite un quatrième. Cette rapidité n'est de toutes façons pas pour déplaire à des musiciens qui vouent - à juste titre - un culte aux années 70, époque bénie foulée par des mastodontes enchaînant à un rythme effréné albums et tournées. Le fait qu'ils poursuivent la simple numérotation comme titre d'album procède aussi de cette référence aux seventies. Ce quatrième effort du quintet germano-anglo-suédois est donc baptisé Lucifer IV. Sans surprise. Mais il n'y a pas que son nom qui n'étonne pas dans cette rondelle qui, il faut malheureusement en convenir, n'apporte rien de neuf pour qui a succombé aux charmes de ses prédécesseurs. Le groupe a-t-il confondu vitesse et précipitation ? Ou bien, plus inquiétant, a-t-il pressé tout le jus de son inspiration ? Toujours est-il que la découverte de ce nouvel opus s'accompagne d'un air tenace de déjà-entendu. Ce qui est d'autant plus regrettable que le récent 45 tours Gone With The Wind Is My Love, qui voyait Johanna Sadonis chanter avec Elin Larsson de Blues Pills, augurait d'une réussite plus franche et jouissive que ce IV à la recette éprouvée. 

Ce jugement peut sembler lapidaire sinon sévère mais les premiers pas de Lucifer étaient de tels joyaux taillés dans un heavy doom occulte et victorien que nous attendions beaucoup (trop) de ce quatrième album et d'une formation incarnée par une des frontwomen parmi les plus charismatiques, flanquée par le très respecté Nicke Andersson, membre historique de Entombed et ex The Hellacopters (est-il encore utile de le rappeler ?). Ceci étant, vierge de surprise donc et de véritable grand moment, ce cru 2021 s'écoute néanmoins avec un plaisir intact. Le groupe, enrichi depuis 2018 par les guitaristes Martin Nordin (Dead Lord) et Linus Björklund, étant ce qu'il est, nous ne saurions le prendre en flagrant délit de médiocrité. C'est donc toujours aussi bien fait. La première moitié de l'écoute épouse les traits efficaces des 'Archangel Of Death', 'Crucifix  (I Burn For You') et 'Bring Me His Head' ou plus rampants de 'Wild Hearses' (le meilleur du lot) et 'Mausoleum' que tapissent des claviers lugubres. En revanche, le second pan peine à s'incruster dans la mémoire. Sans doute parce qu'il arbore un visage plus sombre, moins immédiat ('Cold As A Tombstone'), même si 'Orion' brille d'un éclat aussi ensorcelant que ténébreux. Cette noirceur accrue, qui n'a jamais été totalement absente de son univers, est revendiquée par Lucifer mais freine quelque peu l'impact de ce disque cependant toujours hanté par le charme lascif de sa vestale qui entretient cet alliage de séduction trouble et d'impétuosité sourde. Malgré une maîtrise sans faille au service de bonnes chansons et d'une volonté discrète d'assombrir le propos, Lucifer IV stoppe l'ascension de ses géniteurs dont le heavy doom ne surprend plus, même s'il conserve sa force séduisante et indomptable. (14.11.2021 | MW) ⍖⍖

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