Remarque liminaire : toujours s'enfoncer dans les arcanes creusées par Sombre Présage, les oreilles bouchées par un casque, dans l'obscurité de préférence, condition indispensable sans laquelle la sève immersive de ce drone nécrotique, ne peut accéder à sa pleine (dé)mesure. Plus encore peut-être que Autre temps, recueil aride imprégné d'une religiosité sinistre, Necrodrone impose ce cadre solitaire et autarcique tant il vibre d'une puissance quasi tellurique.
S'il partage avec son récent prédécesseur un même écrin aux multiples visages, CD, cassette ou box ultra-limitée, l'opus s'en éloigne en revanche par sa noirceur oppressante et tentaculaire. Là où Autre temps n'était pas exempt d'une certaine beauté, quoique sévère, Necrodrone n'est que magma terrifiant, lame de fond pétrifiée qui charrie un fracas ténébreux. Bien sûr, son titre comme son visuel tissent un lien évident avec Necrodrone (Origine) dont il incarne la suite douze ans après. Il en poursuit la numérotation en livrant les quatrième et cinquième parties d'un retable monumental qui en appelle d'autres. Voxum, l'unique silhouette derrière Sombre Présage, y renoue avec les compostions dilatées qui ne descendent jamais en-dessous des dix minutes. Sans, malheureusement peut-être, aller aussi loin que sur Murmures funèbres perdus dans la brume dont l'une des deux pistes franchissait les barre des trois quart d'heure ! Necrodrone épouse de fait un format plus classique (tout est relatif).
Reste qu'emboîtés l'un à l'autre, ces deux segments étirent un trou noir aux dimensions infinies qui avalent toute trace de lumière. Et le pèlerin qui s'y aventure, par la même occasion. Alors que son architecture rend possible la description détaillée des deux pans qui le composent, il est pourtant préférable de ne pas chercher à fragmenter ce bloc de matière noire. Car - et au risque de se répéter - Sombre Présage ne s'écoute pas vraiment, ne s'apprivoise pas davantage, il se vit, expérience aussi bien sonore que mystique. Necrodrone dégaze des nappes aussi suffocantes désincarnées qui palpitent d'une telle force hantée venue de l'autre côté du néant qu'elles ont quelque chose de plaques tectoniques qui se chevauchent en un râle assourdissant.
L'œuvre grouille d'émanations corrosives évocatrices de lieux désolés que les hommes ont fui, effluves grondantes qui résonnent comme un souffle funèbre. Ecume dark ambient et drone trempé dans la rouille dévorent une toile aux confins de miasmes bruitistes. Tel est Necrodrone, création effrayante pétrie d'une douleur enfouie dans les souterrains de l'âme humaine... (27.09.2021 | LHN) ⍖⍖⍖
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