29 avril 2022

KröniK - Pestilential Shadows - Revenant (2021)




Si l'Australie ne compte plus parmi les foyers les plus bouillonnants de la chapelle noire comme cela fut le cas il y a une dizaine d'années dans le sillage de Drowning The Light et Austere, pour ne citer que deux formations parmi les plus passionnantes du lot, ce pays des antipodes abrite néanmoins toujours dans son sein d'excellents groupes, porteurs bien souvent d'une identité assez particulière et qui n'appartient qu'à eux. A cela une raison simple : le fait que nombre de musiciens gravitent dans le même coin (la région de la Nouvelle-Galles du Sud) et donc ne cessent de se croiser par conséquent.

Tel est le cas de Pestilential Shadows qui a vu passer, autour de Balam (Luke Mills), son capitaine au long cours, lui-même activiste chevronné (Kinstrife & Blood, Rift...), à peu près tous les mercenaires à la solde de l'art noir australien, dont Wraith (Nazxul) ou la paire Sorrow / Desolate (Austere), faisant de lui une espèce de point de convergence de toute cette cène ténébreuse. Ce qui explique aussi pourquoi l'entité a très tôt attiré l'attention. A juste titre, ses premières offrandes, du séminal Embrace After Death (2005) au quintessentiel Depths (2011) pouvant être considérées comme certaines des illustrations les plus abouties offertes par la terre des kangourous. Mais depuis dix ans et ce quatrième album, Pestilential Shadows se montre malheureusement bien (trop) discret. Désormais avare de sa semence impie, le quatuor n'a délivré durant cette période que Ephemeral (2014), au demeurant tout aussi superbe que ses aînés. Muré dans un pesant silence, il semblait dès lors avoir définitivement disparu. 

Quelle ne fut donc pas notre (agréable) surprise de voir le groupe s'extraire des limbes avec le très justement nommé Revenant. A l'exception du bassiste Gaap qui n'a pas rempilé, le line-up est identique à celui qui a gravé le disque précédent avec, outre Balam évidemment, les guitaristes Decay (ex Erebus Enthroned) et Somnus (Advent Sorrow) sans oublier le batteur Basilysk qui cogne aussi chez Temple Nightside, The Slow Death ou Nazxul (encore). Cet équipage solide et enfin stabilisé assure la très belle tenue de ce sixième opus que nous n'espérions plus. Malgré les forces en présence, cette quasi résurrection aurait quand même pu décevoir. Mais non. Et si elle ne livre sans doute pas le travail le plus original des Australiens, l'œuvre compense ce manque de personnalité par une puissance émotionnelle décuplée. Comme l'illustre d'entrée de jeu le grandiose 'Procession Of Souls' dont les atours aussi pulsatifs que granitiques emprunté au Enslaved de l'ère Below The Light laissent peu à peu la place à une tristesse obsédante que tissent des guitares aux allures de balises perçant le brouillard nocturne. 

Plus efficace, plus mélodique certainement, tel est le visage que Pestilential Shadows adresse sur ce nouvel album. Faut-il le regretter ? Eu égard à l'insolente érection que dressent les quatre musiciens, on ne saurait bouder notre plaisir face à de longues compositions qui brillent malgré tout d'un éclat suffisamment ombrageux pour tailler dans la peau des plaies agressives, témoins 'Hunter And Bearer' et plus encore ce 'The Sword Damocles' qui galope sur une terre néanmoins chargée de désespoir. Pour sa part, le morceau-titre ne souffre tout d'abord d'aucun compromis mélodique mais arrivé à mi-parcours, ses auteurs serrent alors le frein à main pour un mid-tempo qui annonce une échappée finale déchirante. 

Et finalement, tout l'art du groupe réside dans cette faculté à couler des aplats acérés dans les méandres lancinants d'une expression coagulée par une beauté mélancolique, proposant une synthèse entre la noirceur parfois sinistre de Drowning The Light et la force dramatique de Austere. En cela, Revenant ne marque pas uniquement le retour cette entité si talentueuse mais résume à lui seul l'identité de ce black metal australien d'une tristesse féroce. (22.09.2021 | LHN) ⍖⍖⍖

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