10 février 2022

CinéZone | Peter Medak - A Day In The Life Of Joe Egg (1971)




Certains films jouissent d'une exposition flatteuse mais exagérée. D'autres au contraire semblent condamnés à demeurer injustement dans l'ornière de l'oubli. Tel est le cas du pourtant très beau A Day In The Death Of Joe Egg dont on comprend mal sa modeste renommée tant il se hisse sans peine au niveau des meilleurs films britanniques des années 60/70. 

Aux commandes se glisse Peter Medak, un réalisateur qui a promené, sans ligne directrice aucune, son savoir-faire à la télévision pour laquelle il a emballé nombre d'épisodes de séries populaires telles que Amicalement votre, Pour l'amour du risque, Les professionnels, Les enquêtes de Remington Steele et même plus récemment Breaking Bad et Coldcase, mais aussi au cinéma qui le verra signer des bobines aussi différentes que L'enfant du diable (1980), L'âge de vivre (1991), Romeo Is Bleeding (1994) ou La mutante 2 (1998). 

A Day In The Death Of Joe Egg est sa troisième expérience pour le grand écran. Il y fait montre, outre un talent certain, d'une grande audace visuelle, rappelant qu'il participe alors à la nouvelle vague du cinéma anglais d'alors aux côtés des Lindsay Anderson, Tony Richardson, Kareil Reisz, Mike Hodges ou John McKenzie. Ce qui lui permet de s'emparer de la pièce de théâtre à succès de Peter Nichols (qui s'adapte lui-même) sans sombrer dans le piège du simple théâtre filmé. Alan Bates déroule certes un jeu justement théâtral dans ses élans exagérés (néanmoins dans le bon sens du terme) mais Medak parvient à aérer son matériau extrêmement dramatique par des échappées dans l'espace et dans le temps au gré d'incessants retours en arrière. 

Ce titre curieux se réfère à la fille d'un couple, baptisée Josephine, lourdement handicapée et incurable autour de laquelle ses parents ont organisé leur vie. L'œuvre use de l'humour, noir et cynique, pour dépeindre la vie de Bri et de Sheila qui paraissent jouer une comédie autour de leur enfant. Mais derrière les rires et les pitreries de façade, le mal est profond et ne tardera plus à fissurer la fragile harmonie, faite de folie et de séduction, qu'ils ont su définir. La seconde partie, centrée autour d'une soirée entre amis, révèlera l'opposition entre d'un côté le père, désireux d'en finir et essayant sans y parvenir, de laisser mourir leur progéniture et de l'autre, la mère, que l'amour pousse à refuser une issue aussi radicale et macabre. 

Le film ne juge pas mais expose par le biais d'une expression humoristique très anglaise, le désarroi de parents confrontés à l'état végétatif de leur enfant. Et alors qu'il semble se diriger vers une fin heureuse qui eut été incongrue, A Day In The Death Of Joe Egg s'achève au contraire dans une noirceur absolue, plantée dans le décor sordide d'une ville de banlieue et qui voit Bri, émotionnellement dévasté, quitter discrètement cette vie en laissant Sheila seule dans son lit dans l'attente d'une future étreinte... (vu le 23.05.2021) ⍖⍖⍖



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