Pour faire simple, il existe deux écoles du death à la suédoise, l'école de Stokholm, berceau des activistes fondateurs, tels que Entombed, Grave, Unsleashed ou Dismember, à la fin des années 80, et celle de Göteborg, plus attirée par les mélodies que par le son cradingue et roots de chez roots, comme le montrent les ténors du genre que sont In Flames ou Dark Tranquillity. Bien qu'originaire de la capitale, Opeth n'entretient finalement que peu de rapport avec ses confrères du cru. Et pour tout dire, il n'appartient à aucune école, si ce n'est la sienne. Après avoir passer plusieurs années à écumer les clubs, le groupe est repéré par Lee Barrett, du jeune label Candlelight, ce qui lui permet d'entrer en studio en 1994 avec le gourou de toute la scène extrême scandinave, Dan Swanö, pour y accoucher de Orchid, aujourd'hui un peu oublié (comme son successeur d'ailleurs) par ses géniteurs ; ce qui est bien dommage eut égard à sa qualité déjà énorme pour un premier jet. Le projet s'articule alors autour de Mikael Akerfeldt (chant et guitare), du fidèle Peter Lindgren (guitare) et des plus éphémères Johan De Farfalla (basse) et Anders Nordin (batterie). Bien qu'enrobé d'un son plus brut, qui ne rend pas tout à fait honneur à la subtilité, à la délicatesse de la musique, Orchid pose néanmoins déjà les bases du style Opeth, style unique s'il en est, et que ses cadets peaufineront peu à peu, en même temps que le groupe gagnera en maturité.
A un substrat death metal, dont les grognements d'outre-tombe demeurent un des seuls véritables reliquats, les Suédois plaquent des influences issues aussi bien du metal atmosphérique (les passages et intermèdes acoustiques, tels que "Silhouette" et "Requiem") ou du progressif (pour la longueur des morceaux, dont la plupart dépassent allégrement la barre des 10 minutes). "In Mist She Was Standing", "Under The Weeping Moon", "Forest Of October"sont comme des espèces de labyrinthes oscillant au gré des multiples ruptures de rythmes entre le calme et la tempête, entre la douceur et la violence, mais dont la complexité n'étouffe jamais la mélancolie qu'ils exsudent, ni la sombre beauté qui les drape, leur conférant une aura pastorale rare, comme venue des profondeurs d'une forêt baignée par la brume matinale et le soleil naissant (le superbe "The Twilight Is My Robe"). Alors certes, Orchid n'est pas exempt de menus défauts, surtout visibles d'ailleurs à travers le prisme de certains des albums qui ont suivi (voix clairs parfois juste, fluidité moindre entre des diverses ambiances distillées, un style moins limpide), mais cette séminale offrande possède l'innocence et la naïveté des oeuvres de jeunesse, qui sont pour beaucoup dans le charme et dans l'attachement que l'on éprouve pour ce premier essai, dont la majesté illustre bien la maîtrise déjà affirmée des musiciens pour leur art. Un coup de maître et, pour une poignée de vieux cons, dont l'auteur de ces lignes notamment, le meilleur opus jamais offert par les Suédois. (04.04.2007) ⍖⍖⍖⍖
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