1 novembre 2021

KröniK | Demande à la Poussière - Quiétude hostile (2021)




Le premier effort éponyme de Demande à la Poussière fut une des baffes de l'année 2018. Une de ces beignes qui impriment dans la peau et dans la mémoire des stigmates dont les plaies au jus noir purulent ne se sont toujours pas refermées. C'est dire qu'en bons masochistes, nous guettions le retour de ce groupe au potentiel encore à peine défloré. Présentée comme l'alliance entre le chanteur Krys Fruit-Denhez (Omrade, Ophe) et le guitariste Jeff Grimal, la formation a pourtant depuis été amputée de l'ex The Great Old Ones, laissant son comparse avec le fidèle Edgard Chevallier. Nous aurions pu redouter que le départ de celui qui est aussi un illustrateur recherché vide le projet d'une partie de sa valeur et de son identité. Quiétude Hostile balaie cette crainte tel un fétu de paille, tant en termes de qualité que de signature. La première reste toujours très élevée, rappelant l'exigence jamais démentie de Krys Denhez dont chaque nouveau signe de mort sous la bannière de quelque groupe que ce soit répond à un travail et une conception extrêmement élaborés. La seconde s'enfonce comme précédemment dans la fente obscure et labyrinthique d'un black metal fissuré de griffures sludge et post metal. Encore que ces étiquettes résument mal un matériau dense et sévère qui s'affranchit des codes aussi bien conceptuels que sonores. 

Faisant fi de confortables préliminaires, 'Léger Goût de Soufre' nous plonge dans un abîme mortifère dont il est impossible de revenir indemne. Vocalises pétries d'une négativité poisseuse, riffs abrasifs et percussions autoritaires sont à l'unisson d'un désespoir belliqueux. 'Morphème' semble être taillé dans cette même écorce atrabilaire, mais de lointaines nappes de claviers associées à des guitares suintant une beauté souterraine et des rouleaux de batterie viennent timidement tempérer cette marée noire qui s'abat sur nous. L'image d'un album bien plus complexe commence alors se dessiner, illustrant tout l'ambivalence tapie dans son titre. Cathartique comme son aîné, Quiétude Hostile tente de démontrer le gouffre qui sépare souvent la réalité et la perception pessimiste que nous en avons. Ce thème commande une expression tout du long écartelée entre dureté nihiliste et lueurs dramatiques. Certains titres ont quelque chose de puits sans fond ni espoir de retour tels que 'Eréthisme' ou 'Quiétude Hostile' alors que d'autres se révèlent plus contrastés. Citons 'Bois de Justice' que propulse une accélération finale bouleversante et qui paraît s'adresser à nous depuis le bunker d'une pensée malade, ou 'Perdu', derelict hypnotique fardé d'un inexorable désespoir. Mais hanté par un saxophone tragique, le terminal et monstrueux 'Expiravit' noie toute velléité lumineuse, achevant l'écoute sur une note aux confins de la folie la plus déglinguée et corrosive. Avec Quiétude Hostile, Demande à la Poussière ne fait pas que transformer l'essai, il pousse encore plus loin le curseur d'une démence hargneuse qui néanmoins se conjugue à une fragile beauté. (10.04.2021 | MW) ⍖⍖⍖

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