Bien que toujours officiellement actif, Himinbjorg se fait pourtant trop discret depuis une bonne quinzaine d'années, période que seules trois offrandes ont jalonné dont la dernière, l'excellent Wyrd, remonte déjà à 2015 ! Peut-être que Zahaah, son âme et fondateur, s'est-il lassé du black metal et de la scène qui va avec ? Il n'a toutefois pas cessé de travailler son art comme en témoigne aujourd'hui - et enfin - The Chant Of Trees, son nouveau projet. S'il s'inscrit dans la continuité à la fois thématique et spirituelle du dernier album enfanté par Himinbjorg, cependant que la signature du maître des lieux se révèle toujours identifiable, le fait est que les deux groupes s'éloignent en réalité l'un de l'autre par l'expression essentiellement acoustique retenue par le premier. Ceux qui espéraient un retour du Zahaah brutal et torrentiel, de l'époque Golden Age, par exemple, en seront donc pour leurs frais. Est-ce à dire pour autant que ses fidèles ne se retrouveront pas dans The Chant Of Trees ? Que nenni tant il semble bien difficile de résister à l'appel de son premier signe de vie éponyme. Celui-ci s'offre à nous par le biais de son très bel artwork auquel une somptueuse édition en format A5 honore encore davantage, porte d'entrée enchanteresse d'un univers boisé et folklorique. S'il serait tentant de l'arrimer à la veine pagan et chamanique à la mode, dans le sillage du succès de Wardruna, ce projet aussi intime que personnel, s'en distingue à la fois par son approche méditative et son enracinement dans une nature plus féérique et légendaire que tumultueuse.
Epaulé par une chanteuse au timbre idéal pour déclamer ses poétiques mélopées ainsi que par Baptiste Labenne (Boisson Divine) qui, comme sur Wyrd, tapisse l'ensemble de couleurs traditionnelles par le recours d'instruments tels que la mandoline ou la boha, Zahaah nous convie à un périple forestier aussi merveilleux que salvateur. Rituel parfois à l'image du bien nommé 'The Shaman', clairement celtique le temps d'un 'Gaze Of Time' aérien et percussif, laissant au détour d'un 'War Day' plus orageux, filtrer de lointaines réminiscences black metal, mais le plus souvent tendrement osseux ('Springtime Of The Soul'), l'opus irradie une grande force émotionnelle qui possède le rare pouvoir d'envelopper l'auditeur dont il purifie le cœur autant que l'âme. Drapé dans une production puissante et limpide, laissant chaque instrument, chaque arrangement, sans oublier les voix conjuguées de Zahaah et de sa druidesse, envahir l'espace, The Chant Of Trees n'en vibre pas moins d'une mélancolie plus douce que désespérée, comme l'illustrent les deux joyaux de l'écoute, le morceau-titre, d'une entêtante majesté, d'une part et plus encore le diptyque 'The Boundless Seas' dont la première partie s'élève peu à peu pour culminer en un bouleversant feu d'artifice durant lequel affleurent le plus les racines noires et épiques du leader d'Himinbjorg. Il en découle une œuvre contemplative et forestière dont la belle pureté de touches et de traits ne l'exonère pas, bien au contraire, d'une précieuse richesse instrumentale. Nul ne sait s'il continuera l'aventure Himinbjorg mais il semble évident que Zahaah a trouvé dans The Chant Of Trees le jardin secret qu'il peut cultiver avec une forme de paix intérieure. (24.03.2021 | LHN) ⍖⍖⍖
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